Quoi de neuf, aujourd'hui?

mon paradis secret

le 13-02-2009 11:24

Midnight sun-chapitre 2

 

 

 

Je m'adossai au banc de neige, laissant la poudre sèche se réorganiser autour de mes pieds. Ma peau était aussi froide que l'air autour de moi, et la glace ressemblait à du velours sous ma peau.
   Le ciel au-dessus de moi était clair, brillant d'étoiles, d'un bleu rougeoyant par endroits, jaune à d'autres. Les étoiles créaient de majestueuses formes tourbillonnantes contre l'univers noir - une vision époustouflante. Délicieusement belle. Ou plutôt, elle aurait dû l'être. Aurait pu l'être, si j'avais été capable de la regarder correctement.
   Ca n'allait pas mieux. Six jours avaient passé, six jours que je me cachais ici, dans l'étendue sauvage, déserte et désolée de Denali, mais j'étais loin de la liberté que j'avais eu avant de sentir son odeur pour la première fois. Quand j'avais fixé le ciel étincelant, c'était comme s'il y avait eu un obstacle entre mes yeux et sa beauté. L'obstacle était un visage, un visage humain, ordinaire, mais je ne parvenais pas vraiment à le faire disparaître de mon esprit.
   J'entendis les pensées approcher avant d'entendre les pas qui les accompagnaient. Le son du mouvement n'était qu'un faible chuchotement sur la poudreuse.
   Je n'étais pas surpris que Tanya m'ait suivi jusqu'ici. Je savais qu'elle avait, ces derniers jours, retourné dans sa tête la conversation à venir, la retardant jusqu'à ce qu'elle fut parfaitement sûre de ce qu'elle voulait dire.
   Elle apparut dans la lumière à soixante mètres de là, bondissant sur la pointe d'une roche noire, se balançant là-haut sur ses pieds nus. Sa peau était teintée d'argenté par la lumière des étoiles et ses longues boucles blondes brillaient, pâles, presque roses. Ses yeux d'ambre miroitaient tandis qu'elle m'espionnait, à moitié cachée dans la neige, et ses lèvres pleines s'étendirent lentement en un sourire.
   Exquise. Si j'avais été réellement capable de la voir. Je soupirai.
   Elle s'accroupit sur la pointe de la pierre, le bout de ses doigts touchant la roche, son corps se replia.

"Boulet de cannon", pensa-t-elle.

   Elle se lança elle-même dans les airs ; sa silhouette devint une ombre tandis qu'elle tournoyait avec grâce entre les étoiles et moi. Elle se roula en boule alors qu'elle heurtait le banc de neige compacte à côté de moi.
   Un tourbillon de neige s'élevé autour de moi. Les étoiles s'obscurcirent et je fus profondément enterré dans un nuage de cristaux glacés et plumeux. Je soupirai à nouveau, mais ne fis aucun mouvement pour me déterrer. L'obscurité sous la neige ne blessa ni n'obscurcit ma vue. Je voyais encore le même visage.

_ Edward ?

   La neige vola de nouveau tandis que Tanya m'exhumait pronptement. Elle balaya la poudre de mon visage immobile, sans me regarder complètement dans les yeux.

_ Désolée, murmura-t-elle. C'était une plaisanterie.
_ Je sais. C'était amusant.

   Sa bouche se tordit à nouveau.

_ Irina et Kate ont dit que je devrais te laisser partir seul. Elles pensent que je t'agace.
_ Pas du tout, lui assurai-je. Je suis le seul à être impoli... horriblement impoli. Je suis vraiment désolé.

"Tu rentres chez toi, n'est-ce pas ?" pensa-t-elle.

_ Je ne suis pas encore... complètement... décidé.

"Mais tu ne vas pas rester ici." Sa pensée était maintenant mélancolique, triste.

_ Non. Ca ne semble pas... beaucoup m'aider.

   Elle grimaça.

_ C'est de ma faute ?
_ Bien sûr que non, mentis-je doucement.

"Ne joue pas les gentlemen."

   Je souris.

"Je te mets mal à l'aise", s'accusa-t-elle.

_ Non.

   Elle haussa un sourcil, l'air si incrédule que j'en ris. Un rire bref, suivi d'un autre soupir.

_ D'accord, admis-je. Un petit peu.

   Elle soupira, elle aussi, et se prit le menton dans les mains. Ses pensées étaient chagrinées.

_ Tu es mille fois plus jolie que les étoiles, Tanya. Bien sûr, tu en es déjà parfaitement consciente. Ne laisse pas mon obstination ébranler ta confiance.

   Je ris devant l'improbabilité de cette idée.

_ Je ne suis pas habituée à être rejetée, grommela-t-elle, sa lèvre inférieure ressortant en une charmante moue.
_ Evidemment, approuvai-je, essayant sans trop de succès de bloquer ses pensées tandis qu'elle se promenait fugitivement dans les souvenirs de ses milliers de conquêtes réussies.

   La plupart du temps, Tanya préférait les hommes humains - ils étaient plus populaires pour une chose, avec l'avantage d'être moelleux et chauds. Et toujours enthousiastes, sans aucun doute.

_ Succube, la taquinai-je, espérant rompre le fil des images défilant dans sa tête.

   Elle sourit, ses dents étincelant :

_ L'original.

   Contrairement à Carlisle, Tanya et ses soeurs avaient lentement découvert leur conscience. A la fin, ce fut leur penchant pour les hommes humains qui entraîna les soeurs à se détourner du massacre. Maintenant, les hommes qu'elles aimaient... vivaient.

_ Quand tu t'es montré ici, dit lentement Tanya, j'ai pensé que...

   Je savais ce qu'elle avait pensé. Et j'aurais dû deviner qu'elle le verrait de cette façon. Mais, à ce moment-là, je n'étais pas au meilleur de ma forme pour analyser ses réflexions.

_ Tu as pensé que j'avais changé d'avis.
_ Oui, se renfrogna-t-elle.
_ Je me sens horrible de jouer avec tes prévisions, Tanya. Ca ne veut pas dire que... - je n'avais pas réfléchi. C'est juste que je me suis senti... pressé.
_ Je suppose que tu ne me diras pas pourquoi... ?

   Je m'assis et enroulai mes bras autour de mes jambes, me pelotonnant dans une posture défensive.

_ Je ne veux pas parler de ça.

   Tanya, Irina et Kate étaient très douées dans cette vie à laquelle elles s'étaient dévouées. Même plus, d'une certaine façon, que Carlisle. Malgré l'extrême proximité qu'elles se permettaient avec ceux qui auraient dû être - et avaient été - leurs proies, elles ne faisaient pas d'erreurs. J'avais honte d'avouer ma faiblesse à Tanya.

_ Des problèmes avec les femmes ? supposa-t-elle, malgré ma réticence.

   J'eus un rire sombre.

_ Pas de la façon dont tu l'imagines.

   Elle était silencieuse maintenant. J'entendais ses pensées tandis qu'elle allait de supposition en supposition, essayant de déchiffrer la signification de mes mots.

_ Tu en es loin, lui dis-je.
_ Un indice ? demanda-t-elle.
_ S'il te plaît, laisse tomber, Tanya.

   Elle se tut une nouvelle fois, spéculant encore. Je l'ignorai, tentant en vain d'apprécier les étoiles. Elle abandonna après un moment de silence et ses réflexions se poursuivirent dans une direction différente.

"Où iras-tu si tu pars, Edward ? Tu retourneras avec Carlisle ?"

_ Je ne crois pas, murmurai-je.

   Où irai-je ? Je ne pouvais trouver, sur toute cette planète, un endroit qui eut le moindre intérêt pour moi. Il n'y avait rien que je voulais voir ou faire. Parce que le problème n'était pas de savoir où j'irai : ce n'était pas comme si j'irais quelque part, je ne ferais que fuir.
   Je détestais ça. Quand étais-je devenu un tel lâche ?
   Tanya passa son bras mince autour de mes épaules. Je me raidis, mais ne reculai pas à son contact. Elle essayait de me dire que rien ne valait mieux que le réconfort d'un ami. Dans l'essentiel.

_ Je pense que tu vas rentrer chez toi, dit-elle, sa voix reprenant une légère pointe de son accent russe perdu. Pas de problème avec ce qui... ou qui... te hante. Tu y feras face. Tu es comme ça.

   Ses pensées étaient aussi certaines que ses mots. J'essayai d'étreindre l'image de moi qu'elle avait dans la tête. Celle qui faisait face aux choses la tête haute. C'était agréable de penser à moi de cette manière. Je n'avais jamais douté de mon courage, de mon habileté à faire face aux difficultés, avant cette horrible heure en classe de biologie au lycée, il y avait peu de temps.
   Je lui embrassai la joue, reculant promptement lorsqu'elle tourna son visage vers le mien, les lèvres déjà plissées. Ma rapidité la fit sourire d'un air piteux.

_ Merci, Tanya. J'avais besoin d'entendre ça.

   Ses pensées devinrent irascibles.

_ J'imagine que tu es le bienvenu. J'aimerai que tu sois plus raisonnable quant à ces choses-là, Edward.
_ Je suis déolé, Tanya. Tu sais que tu es trop bien pour moi. Je n'ai juste... pas encore trouvé ce que je cherche.
_ Bien. Si tu pars avant qu'on ne se revoie... au revoir, Edward.
_ Au revoir, Tanya.

   Alors que je prononçai ces mots, je pus le voir. Je pus me voir partir. Être assez fort pour retourner au seul endroit où je voulais être.

_ Merci encore.

   En un mouvement habile, elle fut sur ses pieds, puis elle s'éloigna comme un fantôme à travers la neige si rapidement que ses pieds n'avaient pas le temps de s'enfoncer dedans. Elle ne laissa aucune empreinte derrière elle. Elle ne regarda pas en arrière. Mon rejet la tracassait plus qu'elle ne l'aurait dit, même en pensée. Elle ne voulait pas me revoir avant mon départ.
   Ma bouche se tordit avec chagrin. Je n'aimais pas blesser Tanya, bien que ses sentiments ne fussent pas profonds, guère purs, et en aucun cas une chose à laquelle je pouvais répondre. Cela me faisait me sentir bien en dessous d'un gentleman.
   Je posai mon menton sur mes genoux et fixai du nouveau les étoiles, bien que je fusse soudainement désireux d'être sur la route. Je savais qu'Alice me verrait revenir à la maison, qu'elle le dirait aux autres. Cela les rendrait heureux - surtout Carlisle et Esmé. Mais je contemplai les étoiles pendant un moment encore, essayant de voir à travers le visage dans ma tête. Entre les lumières brillantes et moi, une paire d'yeux perplexes marron chocolat me fixaient, semblant me demander ce que ma décision signifiait pour elle. Je ne pouvais évidemment pas être certain que ce fut cela que ses yeux cherchaient. Même dans mon imagination, je ne pouvais entendre ses pensées. Les yeux de Bella Swan continuaient de me questionner, et la vue des étoiles continuait de m'échapper. Avec un gros soupir, j'abandonnai et me remis sur mes pieds. Si je courais, je pourrais être de retour à la voiture de Carlisle en moins d'une heure...
   Dans ma hâte de retrouver ma famille - et voulant vraiment être le Edward qui faisait front la tête haute - je m'élançai à travers le champ de neige étoilé, sans laisser la moindre empreinte de pas.

***

_ Ca devrait aller, souffla Alice.

   Ses yeux étaient troublés, et Jasper la prit doucement par le coude, la guide vers l'avant tandis que nous marchions en groupe serré dans la cafétéria. Rosalie et Emmett étaient en tête, Emmett ressemblant ridiculement à un garde du corps au milieu d'un territoire ennemi. Rosalie aussi paraissait prudente, mais plus irritée que protectrice.

_ Evidemment, grommelai-je.

   Son comportement était grotesque. Si je n'étais pas sûr que je pouvais supporter ce moment, je serais resté à la maison.
   Le changement brutal de notre matinée normale, et même amusante - il avait neigé pendant la nuit, et Emmett et Jasper n'en étaient pas au point de prendre avantage de ma distraction pour me bombarder de boules de neige ; quand ils s'étaient ennuyés de mon absence de réponse, ils s'étaient retournés contre les autres - quant à cette vigilance exagérée aurait été amusant, s'il n'était pas agaçant.

_ Elle n'est pas encore là, mais elle approche de l'entrée... Elle ne sera pas en sécurité si nous nous asseyons à notre endroit habituel.
_ Bien sûr que nous allons nous asseoir à nos places habituelles. Arrête ça, Alice. Tu me tapes sur les nerfs. J'irai parfaitement bien.

   Elle cilla une fois tandis que Jasper l'aidait à s'installer sur sa chaise, puis ses yeux se concentrèrent finalement sur mon visage.

_ Hmm, dit-elle d'un air surpris. Je pense que tu as raison.
_ Evidemment, marmonnai-je.

   Je détestais être le centre de leur attention. Je ressentis une soudaine sympathie pour Jasper, me rappelant de toutes les fois où nous avions rôdé autour de lui de façon protectrice. Il croisa brièvement mon regard et sourit.

"Agaçant, hein ?"

   Je grimaçai.
   Etait-ce juste la semaine dernière que cette longue pièce terne m'avait semblé aussi maussade ? Que ça paraissait presque comme dormir, comme être dans le coma, que d'être là ?
   Aujourd'hui, mes nerfs étaient tendus au possible - des cordes de piano tendues par la plus grande pression. Mes sens étaient plus qu'en alerte. Je scannais tous les sons, toutes les vues, tous les mouvements de l'air qui touchaient ma peau, toutes les pensées. Particulièrement les pensées. Il n'y avait qu'un seul sens que je gardai bloqué, refusant de m'en servir. Mon odorat, s'entend. Je ne respirais pas.
   Je m'étais attendu à entendre plus de choses à propos des Cullen dans les pensées à travers lesquelles je passais. J'avais attendu toute la matinée, cherchant la nouvelle connaissance à qui Bella Swan avait dû se confier, essayant de voir la direction que le nouveau commérage prendrait. Mais il n'y avait rien. Personne ne remarquait les cinq vampires dans la cafétéria, simplement les mêmes qu'avant l'arrivée de la nouvelle fille. Plusieurs humains étaient encore en train de penser à elle, ils y songeaient encore de la même façon que la semaine précédente. Au lieu de trouver ça ennuyeux, j'étais maintenant fasciné.
   N'avait-elle rien dit à personne à propos de moi ?
   Il était impossible qu'elle n'eut pas remarqué mon regard noir et meurtrier. J'avais vu sa réaction. Je l'avais sûrement effrayée. J'avais été persuadé qu'elle aurait parlé de cela à quelqu'un, peut-être même exagéré l'histoire pour la rendre meilleure. M'attribuant quelques paroles menaçantes.
   Et puis, elle m'avait aussi entendu essayer de sortir de notre classe de biologie. Elle devait se demander, après avoir vu mon expression, si elle en était la cause. Une fille normale voudrait poser des questions autour d'elle, comparer son expérience à celles des autres, cherchant un point commun qui expliquerait mon comportement, si elle ne se sentait pas unique. Les humains étaient constamment désespérés de se sentir normaux, de s'intégrer. S'harmoniser avec tous ceux autour d'eux, comme un troupeau de mouton sans caractère. Cette nécessité était particulièrement forte pendant l'adolescence où chacun manquait de confiance. Cette fille ne serait pas une exception.
   Mais aucun d'entre eux ne remarqua que nous étions assis là, à notre table habituelle. Bella devait être remarquablement timide, si elle ne s'était confiée à personne. Peut-être qu'elle avait parlé à son père, peut-être que c'était une relation plus forte... bien que cela sembla improbable, prétextant le fait qu'elle n'avait pas passé suffisamment de temps avec lui dans toute sa vie. Elle devait être plus proche de sa mère. Donc, je devrais bientôt passer par le chef Swan, un jour où l'autre, et écouter ce qu'il pensait.

_ Quelque chose de nouveau ? demanda Jasper.
_ Rien. Elle... doit n'avoir rien dit.

   Ils levèrent tous un sourcil à cette nouvelle.

_ Peut-être que tu ne fais pas aussi peur que tu le crois, dit Emmett en gloussant. Je parie que je pourrais l'effrayer plus que ça.

   Je roulai des yeux.

_ Je me demande pourquoi... ?

   Il était une fois de plus déconcerté par ma révélation quant au silence unique de cette fille.

_ Nous étions persuadés qu'elle parlerait, alors je ne sais pas.
_ Elle entre, murmura ensuite Alice.

   Je sentis mon corps se raidir.

_ Essaie d'avoir l'air humain.
_ Humain, tu dis ? demanda Emmett.

   Il leva son poing droit, tournant ses doigts pour révéler la boule de neige qu'il avait conservé dans sa paume. Evidemment, elle n'avait pas fondu. Il la compressa en un bloc de glace bosselé. Il fixait Jasper, mais je vis la direction que prenaient ses pensées. Autant qu'Alice, bien sûr. Lorsqu'il lança brutalement le morceau de glace sur elle, elle le renvoya au loin avec une légère pichenette. La glace ricocha sur toute la longueur de la cafétéria, trop rapide pour être vue par des yeux humains, et se fracassa avec un craquement aigu contre le mur de briques. La brique craqua, elle aussi.
   Les têtes, dans ce coin de la salle, se tournèrent toutes pour regarder la pile de débris de glace sur le sol, puis pivotèrent pour trouver le coupable. Ils ne cherchèrent pas plus loin qu'à quelques tables autour. Pas un seul ne nous regarda.

_ Très humain, Emmett, dit Rosalie d'une voix cinglante. Pourquoi ne donnes-tu pas un coup de poing dans le mur pendant que tu y es ?
_ Ca aurait l'air trop impressionnant si je faisais ça, bébé.

   J'essayai de faire attention à eux, gardant mon sourire comme si je prenais part à leur badinage. Je ne pouvais pas me permettre de regarder vers la file dans laquelle je savais qu'elle se tenait. Mais c'était tout ce que j'écoutais.
   Je pouvais entendre l'impatience de Jessica avec la nouvelle fille, qui semblait distraite, elle aussi, restant immobile dans la file mouvante. Je voyais, dans les pensées de Jessica, que les joues de Bella Swan s'étaient une fois de plus colorées de rose.
   Je m'arrêtai brièvement, la respiration peu profonde, prêt à cesser de respirer si le moindre soupçon de son odeur atteignait l'air près de moi.
   Mike Newton était avec les deux filles. J'entendis leurs deux voix, mentales et orales, lorsqu'il demanda à Jessica ce qui n'allait pas avec la fille Swan. Je n'aimais pas la façon dont ses pensées s'emballaient à propos d'elle, le clignotement de fantasmes déjà établis qui embuait son esprit pendant qu'il la regardait entrer et ressortir de ses rêveries comme si elle avait oublié qu'il était là.

_ Rien, entendis-je Bella dire d'une voix douce et claire qui semblait résonner comme une clochette par-dessus les babillements dans la cafétéria, mais je savais que c'était parce que je l'écoutais trop intensément. Je ne prendrai qu'une limonade, aujourd'hui, continua-t-elle tandis qu'elle rattrapait la file.

   Je ne pus m'empêcher de jeter un rapide coup d'oeil dans sa direction. Elle fixait le sol, son sang quittant rapidement son visage. Je regardai vivement ailleurs, vers Emmett, qui rigola au sourire peiné que j'affichais maintenant.

"Tu as l'air malade, frangin."

   Je modifiai mes traits de façon à ce que mon expression parut décontractée et naturelle.
   Jessica s'interrogeait à voix haute quant à l'absence d'appétit de la fille.

_ Tu n'as pas faim ?
_ Je suis un peu patraque.

   Sa voix était faible, mais encore très claire.
   Pourquoi est-ce que l'inquiétude protectrice qui émana soudain des pensées de Mike Newton m'ennuyait-elle ? En quoi était-ce un problème qu'il y eut un lien protecteur entre eux ? Ce n'était pas mes affaires si Mike Newton se sentait en permanence inquiet pour elle. Peut-être était-ce dû à la façon dont tout le monde réagissait face à elle. Ne voulais-je pas, instinctivement, la protéger également ? Avant, j'aurai voulu la tuer, c'était...
   Mais la fille était-elle malade ?
   Il était difficile de juger - elle avait l'air tellement fragile avec sa peau translucide... Puis je remarquai que j'étais inquiet, moi aussi, exactement comme ce garçon stupide, et je me forçai à ne pas penser à sa santé.
   Malgré tout, je n'aimais pas la surveiller à travers les pensées de Mike. J'embrayai sur celles de Jessica, observant avec attention tandis que tous les trois choisissaient à quelle table s'asseoir. Heureusement, ils s'installèrent avec les amis habituels de Jessica, à l'une des premières tables de la pièce. Pas abrités, juste comme Alice l'avait promis.
   Alice me donna un coup de coude.

"Elle va bientôt te regarder, agis comme un humain."

   Je serrai les dents derrière mon sourire.

_ Du calme, Edward, dit Emmett. Franchement, même si tu tues un humain, ce ne sera pas vraiment la fin du monde.
_ Tu aimerais bien le savoir, marmonnai-je.

   Emmett rigola.

_ Tu dois apprendre à passer au-dessus des choses, comme je le fais. L'éternité est une longue période pour se vautrer dans la culpabilité.

   Juste à ce moment-là, Alice jeta une petite poignée de glace qu'elle avait cachée au visage naïf d'Emmett.
   Il cligna des yeux, surpris, puis sourit d'avance.

_ Tu l'as cherché, dit-il en se penchant au-dessus de la table et en secouant ses cheveux incrustés de glace dans sa direction.

   La neige, qui fondait dans la chaleur de la salle, s'envola de ses cheveux en une épaisse averse mi-liquide mi-gelée.

_ Hé ! se plaignit Rosalie tandis qu'elle et Alice reculaient devant le déluge.

   Alice rit, et nous l'imitâmes. Je pouvais voir dans la tête d'Alice comment elle orchestrait ce moment parfait, et je savais que la fille - je devrais arrêter de penser à elle de cette façon, comme si elle était la seule fille au monde - que Bella nous regardait rire et jouer, ressemblant à une joyeuse, humaine et irréaliste peinture de Norman Rockwell.
   Alice, qui continuait de rire, prit son plateau en guise de bouclier. La fille - Bella nous regardait encore.

"... regarde encore les Cullen", pensa quelqu'un, attirant mon attention.

   Je regardai automatiquement vers l'appel involontaire, réalisant pendant que mes yeux trouvaient leur destination que je reconnaissais la voix - je l'avais par trop écoutée aujourd'hui.
   Mais mes yeux glissèrent directement au-delà de Jessica et se concentrèrent sur le regard pénétrant de la fille.
   Elle baissa rapidement les yeux, se cachant à nouveau derrière ses cheveux épais.
   A quoi pensait-elle ? Le temps qui passait semblait rendre la frustration plus vive, plutôt que de l'engourdir. J'essayai - incertain de ce que je faisais puisque je n'avais jamais eu à la faire avant - de sonder le silence autour d'elle avec mon esprit. Mon ouïe hyper développée me revint naturellement, comme toujours, sans rien demander : je n'avais jamais eu à travailler là-dessus. Mais, maintenant, je me concentrai, tentant de causer une brèche à travers ce qui l'entourait comme un bouclier.
   Rien que le silence.

"Qu'est-ce qui ne va pas avec elle ?" pensa Jessica, faisant écho à ma propre pensée.

_ Edward Cullen te mate, murmura-t-elle à l'oreille de la fille Swan avec un petit rire.

   Il n'y avait aucune trace de son irritation jalouse dans son ton. Jessica semblait être douée pour feindre l'amitié.
   J'écoutais, absorbé, la réponse de la fille.

_ Il n'a pas l'air furieux, hein ? murmura-t-elle en retour.

   Ainsi, elle avait remarqué ma réaction violente de la semaine dernière. Evidemment.
   La question troubla Jessica. Je vis mon propre visage dans ses pensées tandis qu'elle examinait mon expression, mais je ne croisai pas son regard. J'étais toujours concentré sur la fille, tentant d'entendre quelque chose. Mon intense concentration ne semblait pas m'aider le moins du monde.

_ Non, lui dit Jessica, et je savais qu'elle aurait souhaité pouvoir dire oui - comment elle ne l'acceptait pas, mon regard - bien qu'il n'y eut aucune trace de cela dans sa voix. Il devrait ?
_ Je crois qu'il ne m'apprécie guère, murmura la fille en posant sa tête sur son bras comme si elle était soudain fatiguée.

   J'essayai de comprendre ce mouvement, mais je ne pouvais faire que des suppositions. Peut-être était-elle fatiguée.

_ Les Cullen n'aiment personne..., la rassura Jessica. Enfin, disons qu'ils ne s'intéressent pas assez aux autres pour les aimer.

"Ils ne s'intègrent jamais."

   Sa pensée était un grommellement de plainte.

_ En tout cas, il continue à t'admirer.
_ Arrête de le regarder, dit nerveusement la fille, levant la tête de sur son bras pour vérifier que Jessica obéissait à son ordre.

   Jessica ricana, mais fit ce qu'elle lui demandait.
   La fille ne regarda plus ailleurs qu'à sa table pendant le reste de l'heure. Je pensais - bien que, bien sûr, je ne pouvais en être sûr - que c'était délibéré. Il semblait qu'elle aurait voulu me regarder. Son corps aurait voulu bouger légèrement dans ma direction, son menton aurait voulu commencer à se tourner. Puis elle se ressaisissait elle-même, prenant une profonde inspiration, et regardai fixement celui qui parlait.
   J'ignorai, pour la plupart, les pensées qui traînaient autour d'elle puisqu'elles ne la concernaient pas, pour le moment. Mike Newton prévoyait une bataille de boules de neige dans le parking, après les cours, ne semblant pas réalisé que la neige s'était déjà changée en pluie. Le battement des légers flocons contre le toit était devenu l'habituel crépitement des gouttes d'eau. Ne pouvait-il réellement pas entendre le changement ? Cela semblait bruyant pour moi.
   Quand la pause déjeuner prit fin, je restai sur ma chaise. Les humains sortirent et je me surpris à essayer de distinguer le son de leurs pas du reste, comme s'il y avait quelque chose d'important ou d'inhabituel à leur propos. Complètement idiot.
   Aucun membre de ma famille ne fit un geste pour partir. Ils attendaient de voir ce que je voulais faire.
   Voulais-je aller en cours ? M'asseoir à côté de la fille dont je pourrais sentir l'absurdement puissante odeur de son sang et la chaleur de ses pulsations dans l'air sur ma peau ? Etais-je assez fort pour ça ? Ou en avais-je eu assez pour la journée ?

_ Je... pense... que c'est bon, dit Alice, hésitante. Ton esprit est déterminé. Je pense que tu tiendras pendant l'heure.

   Mais Alice savait bien avec quelle rapidité un esprit pouvait changer.

_ Pourquoi repousser ça, Edward ? demanda Jasper.

   Bien qu'il ne voulait pas se sentir satisfait que je fus celui qui se sentait faible, à présent, je pus entendre qu'il l'était, juste un peu.

_ Rentre à la maison. Prends ton temps.
_ Quel est le marché ? désapprouva Emmett. Soit il la tue, soit il ne la tue pas. C'est peut-être aussi bien qu'il traverse ça, d'une façon ou d'une autre.
_ Je ne veux pas déjà déménager, se plaignit Rosalie. Je ne veux pas de nouveau tout recommencer. Nous avons presque fini le lycée, Emmett. Enfin.

   J'étais également déchiré quant à ma décision. Je voulais, sérieusement, faire face plutôt que fuir au loin une nouvelle fois. Mais je ne voulais pas non plus me pousser moi-même trop loin. D'après Jasper, ça avait été une erreur de partir aussi longtemps sans chasser, la semaine dernière. Etait-ce une erreur absurde ?
   Je ne voulais pas déraciner ma famille. Aucun d'entre eux ne me remercierait pour ça.
   Mais je voulais aller à mon cours de biologie. Je réalisai que je voulais revoir son visage.
   Ce fut ce qui me décida. Cette curiosité. J'étais en colère contre moi-même de ressentir ça. Ne m'étais-je pas promis que je ne laisserai pas le silence de l'esprit de cette fille me faire m'intéresser outre mesure à elle ? Et j'étais maintenant plus qu'excessivement intéressé.
   Je voulais savoir ce qu'elle pensait. Son esprit était fermé, mais ses yeux étaient vraiment ouverts. Peut-être que je pourrais lire en eux.

_ Non, Rosalie, je pense vraiment que ça ira bien, dit Alice. Ca s'est... précisé. Je suis sûre à quatre-vingt-treize pourcent que rien de mauvais n'arrivera s'il va en cours.

   Elle posa sur moi un regard inquisiteur, se demandant ce qui avait changé dans mes pensées pour que sa vision lui montrât un avenir plus sûr.
   Ma curiosité serait-elle suffisante pour garder Bella Swan en vie ?
   Emmett avait raison, toutefois - pourquoi ne serait-ce pas aussi bien ? Je voulais faire face à la tentation.

_ Allons en cours, ordonnai-je en m'écartant de la table.

   Je me retournai et m'éloignait d'eux à grands pas, sans un regard en arrière. Je pouvais entendre l'inquiétude d'Alice, la censure de Jasper, l'approbation d'Emmett et l'irritation de Rosalie traîner derrière moi.

   Je pris une dernière profonde inspiration devant la porte de la salle de cours et la conservait dans mes poumons en marchant dans la petite et chaude pièce.
   Je n'étais pas en retard. M. Banner était encore en train d'installer le laboratoire du jour. La fille était à ma - à notre table, le visage à nouveau baissé, regardant le cahier sur lequel elle gribouillait. J'examinai l'esquisse en approchant, intéressé même par cette insignifiante création de son esprit, mais c'était dépourvu de sens. Juste un barbouillage hasardeux de noeuds dans d'autres noeuds. Peut-être n'était-elle pas concentrée sur le dessin, peut-être pensait-elle à autre chose ?
   Je tirai mon tabouret en arrière avec une rudesse inutile, la laissant gratter contre le linoléum : les humains se sentaient toujours plus à l'aise quand du bruit annonçait l'arrivée de quelqu'un.
   Je savais qu'elle l'entendait : elle ne leva pas les yeux, mais sa main manqua l'un des noeuds du motif qu'elle dessinait, le déséquilibrant.
   Pourquoi ne levait-elle pas les yeux ? Elle avait sûrement peur. Je devais être sûr de la quitter avec une meilleure impression cette fois. Faire en sorte qu'elle pense qu'elle s'était imaginée des choses avant.

_ Bonjour, dis-je de la voix douce que j'utilisais quand je voulais mettre les humains à l'aise, formant un sourire poli sur mes lèvres qui ne montrait pas mes dents.

   Elle leva la tête et ses grands yeux marron surpris - presque perplexes - s'emplirent de nombreuses questions silencieuses. C'était la même expression qui avait obscurcit ma vue pendant toute la semaine dernière.
   Alors que je regardais dans ces yeux marron étrangement profonds, je réalisai que la haine - la haine que j'avais imaginé que cette file méritait, d'une façon ou d'une autre, pour le simple fait d'exister - s'était évaporée. Ne pas respirer maintenant, ne pas goûter son odeur, il était difficile de croire que quelqu'un d'aussi vulnérable pourrait jamais justifier la haine.
   Ses joues commencèrent à rougir et elle ne dit rien.
   Je gardai mes yeux sur les siens, uniquement concentré sur leur profondeur interrogatrice, et tentai d'ignorer la couleur appétissante de sa peau.

_ Je m'appelle Edward Cullen, me présentai-je, bien que je sus qu'elle le savait déjà, mais c'était la façon la plus polie de commencer. Je n'ai pas eu l'occasion de me présenter, la semaine dernière. Tu dois être Bella Swan.

   Elle sembla troublée - il y avait de nouveau cette petite ride entre ses yeux. Cela lui prit une demie seconde de plus qu'il ne le fallait pour répondre.

_ D'où... d'où connais-tu mon nom ? demanda-t-elle et sa voix trembla légèrement.

   J'avais vraiment dû la terrifier. Cela me fit me sentir coupable : elle était tellement sans défense. Je ris gentiment - un son que je savais qu'il mettait les humains à l'aise. A nouveau, je fis attention à mes dents.

_ Oh, ce n'est un secret pour personne.

   Elle avait sûrement remarqué qu'elle était devenue le centre d'attention dans cet endroit monotone.

_ Tu étais attendue comme le messie, tu sais.

   Elle fronça les sourcils comme si cette information lui était déplaisante. Je supposai, qu'étant timide comme elle l'était, que l'attention paraissait être, pour elle, une mauvaise chose. Beaucoup d'humains ressentaient le contraire. Plutôt, ils ne voulaient pas être mis à l'écart du troupeau, en même temps qu'ils désiraient qu'un spot de lumière soit braqué sur leur uniformité individuelle.

_ Ce n'est pas ça, dit-elle. Pourquoi Bella ?
_ Tu préfères Isabella ? demandai-je, troublé par le fait que je voyais pas où ses questions menaient.

   Je ne comprenais pas. Elle avait certainement fait nettement montre de sa préférence plusieurs fois depuis le premier jour. Les humains étaient-ils tous aussi complexes sans l'entente mentale comme guide ?

_ Non, répondit-elle en penchant légèrement sa tête sur le côté.

   Son expression - si je la lisais correctement - était partagée entre embarras et confusion.

_ Mais je pense que Charlie... mon père... ne m'appelle pas autrement derrière mon dos. Du moins, c'est ainsi que tout le monde ici paraît me connaître.

   Son visage s'assombrit d'une ombre rose.

_ Ah bon, dis-je faiblement avant de détourner rapidement les yeux de sur son visage.

   Je réalisai seulement maintenant ce que ses questions signifiaient : j'avais une gaffe, une erreur. Si, ce premier jour, je n'avais pas écouté aux portes, je me serais alors initialement adressé à elle en utilisant son nom complet, comme tous les autres. Elle avait remarqué la différence.
   Je ressentis une pointe de malaise. C'était vraiment vif de sa part de relever mon erreur. Vraiment astucieux, tout particulièrement venant de quelqu'un qui était supposé être terrorisé par ma proximité.
   Mais j'avais de plus gros problèmes que les suspicions qu'elle pouvait avoir à mon égard, gardées en sécurité dans sa tête.
   Je manquais d'air. Si je voulais lui parler à nouveau, je devrais inhaler. Ce serait difficile d'éviter de parler. Malheureusement pour elle, partager cette table avec moi faisait d'elle ma partenaire de labo et nous avions à travailler ensemble aujourd'hui. Cela me semblerait bizarre - et inexplicablement impoli - de l'ignorer pendant que nous étions au labo. Cela lui ferait faire plus de suspicions, l'effraierait plus...
   Je m'éloignai d'elle aussi loin que je le pouvais sans bouger mon tabouret, tournant la tête vers l'allée. Je tenais bon, contractant mes muscles, puis aspirai une rapide bouffée d'air pour remplir mes poumons, inspirant uniquement par la bouche.
   Ahh !!
   C'était vraiment pénible. Même sans la sentir, je pouvais la goûter sur ma langue. Ma gorge fut à nouveau soudainement en feu, la soif chaque fois plus puissante que le premier jour où j'avais senti son odeur, la semaine dernière.
   Je grinçai des dents et essayai de me ressaisir.

_ Allez-y, ordonna M. Banner.

   Il sembla que cela me demandait tout le self-control que j'avais obtenu en soixante-dix ans de travail acharné pour me tourner vers la fille, qui regardait la table, et sourire.

_ Les dames d'abord ? proposai-je.

   Elle leva les yeux à mon expression et son visage pâlit, ses yeux s'agrandirent. Y avait-il quelque chose d'étrange dans mon expression ? Etait-elle une fois de plus effrayée ? Elle ne parla pas.

_ A moins que tu préfères que je commence, dis-je doucement.
_ Non, dit-elle et son visage passa de nouveau du blanc au rouge, aucun problème.

   Je fixai l'équipement posé sur la table, le microscope cabossé, la boîte de lamelles, tout plutôt que regarder le sang tourbillonnant sous sa peau claire. Je pris une autre brève inspiration, par la bouche, et grimaçai alors que le goût me faisait mal à la gorge.

_ Prophase, dit-elle après un rapide examen.

   Elle commença à déplacer la lamelle, bien qu'elle l'eut à peine observée.

_ Ca t'embête si je regarde ?

   Instinctivement - stupidement, comme si j'étais de son espèce - je tendis le bras pour arrêter sa main qui emmenait la lamelle. Pendant une seconde, la chaleur de sa peau brûla la mienne. C'était comme une décharge électrique - sûrement plus chaude qu'un simple 37,2 ° C. La chaleur s'étendit à travers ma main et monta dans mon bras. Elle arracha sa main de sous la mienne.

_ Désolé, marmonnai-je, les dents serrées.

   Ayant besoin d'un endroit où regarder, j'empoignai le microscope et jetai un bref coup d'oeil dans l'oculaire. Elle avait raison.

_ Prophase, approuvai-je.

   J'étais encore trop perturbé pour la regarder. Inspirant aussi vite que je le pouvais à travers mes dents serrées et essayant d'ignorer l'ardente soif, je me concentrai sur ce simple devoir, écrivant le mot sur la ligne appropriée de la feuille d'analyse, puis remplaçant la première lamelle par la suivante.
   A quoi pensait-elle maintenant ? Qu'avait-elle ressenti quand j'avais touché sa main ? Ma peau devait être aussi froide que la glace - repoussante. Pas besoin de se demander pourquoi elle était si silencieuse.
   Je regardai la lamelle.

_ Anaphase, me dis-je à moi-même en l'écrivant sur la seconde ligne.
_ Je peux ? demanda-t-elle.

   Je levai les yeux vers elle, surpris de voir qu'elle attendait, une main en partie tendue vers le microscope. Elle n'avait pas l'air apeurée. Pensait-elle réellement que je pouvais donner une réponse erronée ?
   Je ne pouvais aider mais souris à son regard plein d'espoir tandis que je faisais glisser le microscope vers elle.
   Elle regarda dans l'oculaire avec une impatience qui se fana rapidement. Les coins de sa bouche s'affaissèrent.

_ Troisième lamelle ? demanda-t-elle sans lever les yeux du microscope mais en tandant la main.

   Je déposai la lamelle suivante dans sa main, sans laisser ma peau toucher la sienne une fois de plus. Être assis à côté d'elle était comme être assis à côté d'une lampe chaude. Je pouvais me sentir lentement réchauffé par la plus haute température.
   Elle n'observa pas la lamelle pendant longtemps.

_ Interphase, dit-elle nonchalament - peut-être en essayant de faire un peu trop retentir cela - et poussa le microscope vers moi.

   Elle ne toucha pas le papier, mais m'attendit pour écrire la réponse. Je l'examinai - elle avait de nouveau raison.
   Nous finîmes de cette manière, ne prononçant qu'un mot de temps en temps et ne rencontrant jamais les yeux de l'autre. Nous étions les seuls à avoir terminé - les autres, dans la classe, semblaient passer un sale quart d'heure dans le laboratoire. Mike Newton semblait peiner à se concentrer - il essayait de nous regarder, Bella et moi.

"J'espérai qu'il serait resté là où il était allé", pensait Mike en me fixant intensément.

   Hmm, intéressant. Je n'avais pas réalisé que le garçon nourrissait de la rancoeur à mon égard. C'était un nouveau développement, tout aussi récent que l'arrivée de la fille semblait-il. Encore plus intéressant. Je découvrais - à ma surprise - que ce sentiment était réciproque.
   Je baissai à nouveau les yeux sur la fille, perplexe par la grande pagaille et le bouleversement qu'elle apportait, malgré sa banalité et son apparence pacifique, dans ma vie.
   Ce n'était pas que je ne pouvais pas voir ce qui attirait Mike. En fait, elle était plus que jolie... d'une façon peu commune. Mieux qu'être beau, son visage était intéressant. Pas vraiment symétrique - son menton étroit ne s'équilibrait pas avec ses larges pommettes, extrêmes dans le teint - les contrastes lumineux et sombres de son visage, et puis il y avait ses yeux, emplis de secrets silencieux...
   Des yeux qui se plantèrent soudain dans les miens.
   Je la fixai, essayant de deviner même un seul de ses secrets.

_ Tu portes des lentilles, non ? demanda-t-elle tout à coup.

   Quelle étrange question.

_ Non.

   Je souris presque à l'idée de l'amélioration de ma vue.

_ Ah bon, marmonna-t-elle. Tes yeux sont différents, pourtant.

   Je me sentis soudain refroidi, alors que je réalisai que je n'étais apparemment pas le seul à tenter de percer des secrets aujourd'hui.
   Je haussai les épaules, raides, et regardai droit devant, là où le professeur faisait ses rondes. Bien sûr qu'il y avait quelque chose de différent au sujet de mes yeux depuis la dernière fois qu'elle avait regardé dedans. Ma préparation à l'épreuve d'aujourd'hui, à la tentation de ce jour. J'avais passé le week-end entier à chasser, étanchant autant que possible ma soif, exagérant réellement. Je m'étais saturé de sang animal, non pas que cela fit beaucoup de différence devant le scandaleux arôme qui flottait dans l'air autour d'elle. Quand je l'avais regardée la semaine dernière, mes yeux étaient noircis par la soif. Maintenant, mon corps empli de sang, mes yeux étaient d'un or chaud. D'un ambre lumineux, depuis ma tentative d'étancher ma soif.
   Une autre erreur. Si j'avais vu ce qu'elle avait voulu dire avec sa question, j'aurai simplement pu lui répondre "oui".
   J'étais maintenant assis à côté d'humains dans ce lycée depuis deux ans, et elle était la première à m'examiner de suffisamment près pour remarquer le changement de couleur de mes yeux. Les autres, alors qu'ils admiraient la beauté de ma famille, avaient tendance à rapidement regarder par terre lorsque nous leur retournions leurs regards. Ils se tenaient à l'écart, refoulant les détails de notre apparence dans une instinctive tentative de se protéger de l'incompréhensible. L'ignorance était le bonheur parfait pour l'esprit humain.
   Pourquoi fallait-il que ce soit cette fille qui en vit trop ?
   M. Banner s'approcha de notre table. J'inhalai avec gratitude la bouffée d'air pur qu'il apportait avant qu'il ne se mélange à l'odeur de la fille.

_ Laisse-moi deviner, Edward, dit-il en regardant par-dessus nos réponses, tu as estimé qu'Isabella ne méritait pas de toucher au microscope ?
_ Bella, le corrigeai-je automatiquement. Et détrompez-vous, elle en a identifié trois sur cinq.

   Les pensées de M. Banner étaient sceptiques tandis qu'il se tournait vers elle.

_ Tu as déjà travaillé là-dessus ?

   Je la fixai, absorbé, alors qu'elle souriait, l'air légèrement embarrassé.

_ Pas avec des racines d'oignons.
_ De la blastula de féra ? s'enquit M. Banner.
_ Oui.

   Cela le surprit. L'étude d'aujourd'hui était quelque chose qu'il imaginait d'un niveau plus élevé. Il hocha pensivement la tête.

_ Tu suivais un programme pour élèves avancés, à Phoenix ?
_ Oui.

   Elle avait de l'avance donc, et était intelligente pour une humaine. Cela ne me surprit pas.

_ Eh bien, dit M. Banner en plissant les lèvres. Il n'est sans doute pas mauvais que vous deux soyez partenaires de labo. Ainsi les autres gosses peuvent avoir une chance d'apprendre quelque chose par eux-mêmes, marmonna-t-il dans sa barbe en s'éloignant.

   Je doutai que la fille ait pu entendre cette dernière phrase. Elle avait recommencer à gribouiller des noeuds sur son cahier.
   Déjà deux erreurs en une seule demi-heure. Une très piètre démonstration de ma part. Bien que je n'eus aucune idée de ce que la fille pensait de moi - combien était-elle effrayée ? à quel point me suspectait-elle ? - je savais qu'il m'était nécessaire de redoubler d'efforts pour la quitter avec une meilleure opinion de moi. Quelque chose qui noierait mieux dans sa mémoire le souvenir de notre féroce dernière rencontre.

_ Dommage, pour la neige, hein ? dis-je, répétant le petit propos dont j'avais déjà entendu une douzaine d'élèves parler.

   Un ennuyeux, banal sujet de conversation. Le temps - toujours intact.
   Elle me regarda, une méfiance évidente dans les yeux - une réaction anormale à mes mots tout à fait normaux.

_ Pas vraiment, dit-elle, me surprenant à nouveau.

   J'essayais d'orienter la conversation sur des sujets banals. Elle venait d'un endroit chaud, empli de couleurs - sa peau semblait refléter ça, d'une certaine façon, malgré sa blancheur - et le frois devait lui être inconfortable. Ce contact glacé avec moi avait dû...

_ Tu n'aimes pas le froid, devinai-je.
_ Ni l'humidité, approuva-t-elle.
_ Tu dois difficilement supporter Forks.

   "Peut-être n'aurais-tu pas dû venir ici", voulus-je ajouter. "Peut-être devrais-tu repartir là d'où tu viens."
   Je n'étais pas sûr de vouloir cela, toutefois. Je me souviendrai toujours de l'odeur de son sang - n'y avait-il aucune garantie que je ne voulusse pas la suivre n'importe où ? D'ailleurs, si elle partait, son esprit resterait à tout jamais un mystère. Un puzzle permanent et tenace.

_ Tu n'imagines même pas à quel point, dit-elle d'une voix douce, lançant pendant un moment un regard noir derrière moi.

   Ses réponses n'étaient jamais celles auxquelles je m'attendais. Elles me faisaient vouloir poser encore plus de questions.

_ Pourquoi es-tu venue t'installer ici, alors ? demandai-je, réalisant dans l'instant que mon ton était trop accusateur, pas assez décontracté pour ce genre de conversation.

   La question sonna impolie, impudique.

_ C'est... compliqué.

   Elle cligna de ses grands yeux et j'explosai presque de curiosité - la curiosité me brûlait aussi chaudement que la soif dans ma gorge. En fait, je trouvai que c'était légèrement plus facile de respirer. L'agonie devenait plus supportable avec la familiarité.

_ Je devrais réussir à comprendre, insistai-je.

    Peut-être que le simple courtoisie la ferait répondre à mes questions aussi longtemps que je serai assez impoli pour les poser.
   En silence, elle baissa les yeux sur ses mains. Cela me rendit impatient. Je voulais mettre ma main sous son menton et lui faire lever la tête de telle façon que je pourrais lire dans ses yeux. Mais ce serait stupide - dangereux - de ma part de toucher à nouveau sa peau.
   Elle releva brusquement les yeux. C'était un soulagement que de pouvoir à nouveau lire ses émotions en eux. Elle parla d'une voix rapide, empressée.

_ Ma mère s'est remariée.

   Ah, c'était assez humain, facile à comprendre. La tristesse passa dans ses yeux purs et ramena la petite ride entre eux.

_ Ca ne me paraît pas très compliqué, dis-je.

   Ma voix fut douce sans pourtant m'appliquer à la rendre ainsi. Sa tristesse me faisait me sentir étrangement impuissant, souhaiter qu'il y eut quelque chose que je pus faire pour la faire se sentir mieux. Etrange impulsion.

_ Quand est-ce arrive ?
_ En septembre.

   Elle expira profondément - pas vraiment un soupir. Je repris ma respiration alors que son souffle chaud balayait mon visage.

_ Et tu ne l'apprécies pas, devinai-je, partant à la pêche aux informations.
_ Si, Phil est chouette, dit-elle, corrigeant ma supposition, une ombre de sourire relevant à présent les coins de ses lèvres pleines. Trop jeune, peut-être, mais sympa.

   Cela ne collait pas avec le scénario que j'avais construit dans ma tête.

_ Pourquoi n'es-tu pas restée avec eux, s'il est aussi agréable ? demandai-je d'une voix un petit peu trop curieuse.

   Elle résonna comme si j'étais un fouineur. Ce que j'étais, il fallait en convenir.

_ Phil voyage beaucoup. Il est joueur de base-ball professionnel.

   Son sourire s'élargit. Ce choix de carrière l'amusait.
   Je souriais également, sans me prononcer. Je n'avais pas essayé de la faire se sentir à l'aise. Son sourire me faisait juste vouloir sourire en retour - être dans le secret.

_ Célèbre ?

   Je parcourus dans ma tête les listes de joueurs professionnels de base-ball, me demandant quel Phil était son...

_ Non. Il n'est pas très bon, répondit-elle avec un autre sourire. Juste des championnats de second ordre. Il se déplace pas mal.

   Dans ma tête, les listes changèrent instantanément et j'établis une liste de possibilités en moins d'une seconde. En même temps, j'imaginai un nouveau scénario.

_ Et ta mère t'a expédiée ici afin de l'accompagner librement, dis-je.

   Faire des suppositions semblait la pousser à me donner plus de réponses que les questions ne le faisaient. Cela réussit une fois de plus. Son menton s'avança et son expression se fit soudain rebelle.

_ Non, elle n'y est pour rien, dit-elle et sa voix se fit tranchante.

   Ma supposition l'avait bouleversée, bien que je ne pus pas vraiment voir de quelle façon.

_ C'est moi qui l'ai voulu.

   Je ne pouvais pas deviner ce qu'elle voulait dire, ni la source de son dépit. J'étais complètement perdu.
   J'abandonnai. Il n'y avait juste rien à comprendre chez cette fille. Elle n'était pas comme les autres humains. Peut-être que le silence de ses pensées et le parfum de son odeur n'étaient pas les seules choses inhabituelles chez elle.

_ Je ne saisis pas, avouai-je, détestant l'admettre.

   Elle soupira et soutint mon regard plus longtemps qu'un humain n'en était capable.

_ Au début, elle est restée avec moi, expliqua-t-elle lentement, son ton devenant plus malheureux à chaque mot. Elle était malheureuse... Bref, j'ai décidé qu'il était temps que je connaisse un peu mieux Charlie.

   La toute petite ride entre ses yeux se creusa.

_ Et maintenant, c'est toi qui n'es pas heureuse, murmurai-je.

   Je ne pouvais m'empêcher de dire mes hypothèses à voix haute, espérant en apprendre plus de ses réactions. Celle-ci, néanmoins, ne sembla pas loin de la réalité.

_ Et ? (traduit par "La belle affaire !" dans Fascination) dit-elle, comme si ce n'était pas un aspect à prendre en considération.

   Je continuai de la regarder dans les yeux, sentant que j'avais enfin eu un réel aperçu de son âme. Je voyais dans ce seul mot où elle se plaçait elle-même dans ses propres priorités. Contrairement à la plupart des humains, ses propres besoins venaient loin vers le bas de la liste.
   Elle était désintéressée.
   Comme je voyais cela, le mystère de sa personne caché à l'intérieur de son esprit silencieux commença à se dévoiler un petit peu.

_ Ce n'est pas très juste, dis-je.

   Je haussai les épaules, essayant de paraître décontracté, de dissimuler l'intensité de ma curiosité.
   Elle rit, mais sans le moindre amusement.

_ On ne te l'a donc jamais dit ? La vie est injuste.

   Je voulus rire à ces mots, bien que je ne ressentis moi non plus aucun réel amusement. Je savais quelques petites choses sur l'injustice de la vie.

_ J'ai en effet l'impression d'avoir déjà entendu ça quelque part.

   Elle me fixa et sembla à nouveau troublée. Ses yeux clignèrent sur autre chose puis revinrent sur moi.

_ Inutile de se lamenter, par conséquent, me dit-elle.

   Mais je n'étais pas prêt à laisser cette conversation prendre fin. Le petit V entre ses yeux, vestige de son chagrin, me tracassait. Je voulais le lisser du bout de mes doigts. Mais, bien sûr, je ne pouvais pas la toucher. C'était malsain de bien des façons.

_ Tu donnes bien le change, constatai-je lentement, encore en train d'examiner cette nouvelle hypothèse, mais je parie que tu souffres plus que tu ne le laisses voir.

   Elle grimaça, ses yeux se plissant et sa bouche se tordant en une moue bancale, et fixa le devant de la classe. Elle n'aimait pas ça lorsque je devinai juste. Elle n'était pas le martyr moyen - elle ne voulait pas d'un auditoire pour sa douleur.

_ Je me trompe ?

   Elle tressaillit légèrement mais prétendit ne pas m'entendre. Cela me fit sourire.

_ J'en étais sûr !
_ Et en quoi ça te concerne, hein ? demanda-t-elle en continuant de regarder au loin.
_ Bonne question, admis-je, plus pour moi-même que pour lui répondre.

   Sa perception était meilleure que la mienne - elle voyait directement l'essentiel des choses pendant que je me débattais dans les profondeurs, passant aveuglément au crible tous les indices. Les détails de vie totalement humaine ne devraient pas me concerner. Je n'aurais pas dû m'occuper de ce qu'elle pensait. Si ce n'était pas pour protéger ma famille des soupçons, les pensées des humains étaient insignifiantes.
   Je n'étais pas habitué à être le moins intuitif dans une discussion. Je m'appuyais trop sur mon ouïe hyper sensible - je n'étais visiblement pas aussi perspicace que je le croyais.
   La fille soupira et lança des regards noirs à l'avant de la classe. Quelque chose, dans son expression frustrée, était comique. La situation dans son ensemble, la conversation toute entière étaient comiques. Personne n'avait jamais été en aussi grand danger à cause de moi que cette petite fille - je pouvais à tout moment, distrait de ma ridicule absorption par la conversation, inhaler par le nez et l'attaquer avant d'avoir pu m'arrêter - et elle était irritée parce que je n'avais pas répondu à sa question.
 


 
 
le 13-02-2009 11:19

Pas de panique-Midnight sun

Voilà, j'ai fini cette nuit la traduction du chapitre 2 de Midnight Sun, et vous l'aurez donc aujourd'hui. Malheureusement, ce second retard (vous deviez l'avoir hier) est occasionné par le fait que je doive entièrement retaper ma traduction sur le blog car celui-ci trouve les copier-coller de word trop volumineux. Etant épuisée hier quand j'ai achevé la traduction, je n'ai pas eu le courage de tout vous retaper pendant la nuit. Je le fais donc maintenant.
Si vous lisez la page correspondante avant que je n'ai fini de retranscrire entièrement ce chapitre, retournez-y jusqu'à ce que vous voyez "FIN" à la fin XD.
Je pense donc que je traduirai les autres chapitres à même le blog, donc vous n'aurez pas les chapitres de traduits en bloc mais petit à petit. Désolée, c'est plus agréable quand ils sont directement en entier (ya plus qu'à lire et non à chercher où on s'était arrêté la fois précédente) mais c'est trop de boulot que de devoir ensuite tout réécrire. J'espère que vous comprendrez.
En tout cas, bonne lecture (je vous mets une partie du chapitre 2 maintenant, j'ajouterai le reste en fin d'après midi et dans la soirée).

PS : Pardonnez-moi les quelques phrases qui ne veulent rien dire (certaines m'ont posé quelques soucis de traduction et de compréhension XD).
 


 
 
le 12-02-2009 19:51

MIDNIGHT SUN-twilight ch1

JE TIENS JUSTE À PRECISER QUE CE CHAPITRE A ETE PUBLIE LEGALEMENT SUR LE SITE DE STEPHENIE.
ALORS N'ALLEZ PAS M'ACCUSER DE VOLER SON TRAVAIL.
JE NE FAIS QUE DONNER LA CHANCE AUX FANS FRANCAIS DE LIRE CE QUE LES FANS AMERICAINS PEUVENT LIRE EGALEMENT, À SAVOIR, LE PREMIER CHAPITRE DE TWILIGHT (FASCINATION) DU POINT DE VUE D'EDWARD!
JE NE PUBLIERAI PAS LA TRADUCTION DES CHAPITRES SUIVANTS QUI ONT ETE VOLES À L'AUTEUR
MAIS SEULEMENT LE PREMIER QUI, LUI, ETAIT DEJA MIS EN LIGNE PAR STEPHENIE ELLE-MÊME.
(Ainsi que le lien menant à ces chapitres en version originale sur le site de l'auteur)
SUR CE, BONNE LECTURE!
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1

Premier regard




t-w-i-l-i-g-h-tC'était le moment de la journée pendant lequel je souhaitais le plus être capable de dormir.
t-w-i-l-i-g-h-tLe lycée.
t-w-i-l-i-g-h-tOu était-ce purgatoire le bon mot ? S'il existait une quelconque façon d'expier mes péchés, cela devait en quelque sorte être pris en compte. L'ennui n'était pas une chose à laquelle je m'habituais ; chaque jour semblait plus incroyablement monotone que le précédent.
t-w-i-l-i-g-h-tJe suppose que c'était ma forme de sommeil – si le sommeil était défini comme l'état d'inertie entre deux périodes actives.
t-w-i-l-i-g-h-tJe contemplai les fissures qui couraient le long du mur dans le coin opposé de la cafétéria, imaginant des motifs qui n'existaient pas. C'était une façon d'affaiblir les voix qui formaient un brouhaha, comme le flot d'une rivière, à l'intérieur de ma tête.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'ignorai plusieurs centaines de ces voix par pur ennui.
t-w-i-l-i-g-h-tEn ce qui concernait l'esprit humain, j'avais déjà tout entendu. Aujourd'hui, toutes les pensées étaient tournées vers l'insignifiant drame d'un nouvel ajout au petit corps étudiant d'ici. Il en fallait si peu pour les exciter tous. J'avais vu le nouveau visage répété pensée après pensée sous tous les angles. Rien qu'une humaine ordinaire. L'excitation à propos de son arrivée était péniblement prévisible – comme si l'on montrait un objet brillant à un enfant. La moitié des garçons, se comportant comme des moutons, s'imaginaient déjà amoureux d'elle, simplement parce qu'elle était quelque chose de nouveau à regarder. J'essayai encore plus de faire la sourde oreille.
t-w-i-l-i-g-h-tIl n'y avait que quatre voix que je bloquais par courtoisie plus que par dégoût : ma famille, mes deux frères et mes deux sœurs, qui étaient tellement habitués au manque d'intimité en ma présence qu'ils y pensaient rarement. Je leur donnais autant d'intimité que possible. J'essayais de ne pas écouter si je pouvais m'en empêcher.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'essayais tant que je pouvais, pourtant... je savais.
Rosalie pensait, comme d'habitude, à elle-même. Elle avait aperçu le reflet de son profil dans les lunettes de quelqu'un et méditait à présent sur sa propre perfection. Son esprit était une mare peu profonde, sans beaucoup de surprises.
t-w-i-l-i-g-h-tEmmett rageait à propos d'un match de catch qu'il avait perdu la nuit précédente contre Jasper. Il lui faudrait toute sa patience limitée pour attendre la fin de la journée afin d'organiser une revanche. t-w-i-l-i-g-h-tJe ne m'étais jamais senti gênant en entendant les pensées d'Emmett, car il ne pensait à rien qu'il ne dise ensuite à voix haute ou ne mette en œuvre. Peut-être me sentais-je coupable de lire les pensées des autres seulement parce que je savais qu'ils contenaient des choses qu'ils n'avaient pas envie que je sache. Si l'esprit de Rosalie était une mare peu profonde, celui d'Emmett était un lac sans ombres, un verre transparent.
t-w-i-l-i-g-h-tEt Jasper... souffrait. Je réprimai un soupir.
t-w-i-l-i-g-h-tEdward. Alice avait pensé mon nom, et obtint immédiatement mon attention.
C'était comme si elle m'avait appelé à voix haute. J'étais heureux que mon prénom ne soit plus à la mode – c'aurait été agaçant. A chaque fois que quelqu'un aurait pensé à un quelconque Edward, ma tête aurait pivoté automatiquement...
t-w-i-l-i-g-h-tPourtant cette fois-là, je ne tournai pas la tête. Alice et moi étions doués pour ces conversations privées. Il était rare que quelqu'un nous surprenne. Je gardai les yeux fixés sur les lignes du mur.
Comment va-t-il ? demanda-t-elle.
Je grimaçai, seulement une petite altération au coin de ma bouche. Rien qui pourrait interpeller les autres. Je pouvais très bien grimacer d'ennui.
t-w-i-l-i-g-h-tLa voix mentale d'Alice était alarmée à présent, et je vis dans son esprit qu'elle surveillait Jasper de sa vision périphérique. Y a-t-il un danger ? Elle cherchait dans le futur immédiat, survolant les visions de monotonie pour découvrir la raison de ma grimace.
t-w-i-l-i-g-h-tJe tournai lentement la tête vers la gauche, comme si je regardais les briques au mur, soupirai, et revins vers la droite en fixant les fissures du plafond. Seule Alice savait que j'étais en train de secouer la tête.
t-w-i-l-i-g-h-tElle se relaxa. Dis-moi s'il va trop mal.
t-w-i-l-i-g-h-tJe ne bougeai que les yeux, vers le plafond au-dessus de moi, puis les baissai.
t-w-i-l-i-g-h-tMerci de faire ça.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'étais heureux de ne pas avoir à répondre à voix haute. Qu'aurais-je dit ? "Tout le plaisir est pour moi" ? Ce n'était pas le cas. Je n'aimais pas avoir à écouter les luttes internes de Jasper. Etait-il vraiment nécessaire de se tester ainsi ? Le chemin le plus sûr ne serait-il pas d'admettre simplement qu'il ne serait jamais capable de contrôler sa soif comme nous, et de ne pas se pousser dans ses retranchements ? Pourquoi flirter avec le désastre ?
t-w-i-l-i-g-h-tCela faisait deux semaines que nous n'avions pas chassé. Ce n'était pas une période trop longue pour le reste d'entre nous. Un peu incommode de temps en temps – si un humain marchait trop près, si le vent soufflait dans la mauvaise direction. Mais les humains marchaient rarement trop près. Leur instinct leur disait ce que leur esprit conscient n'admettrait jamais : nous étions dangereux.
Jasper était très dangereux à cet instant précis.
t-w-i-l-i-g-h-tA ce moment, une fille de petite taille s'arrêta au bout de la table la plus proche de la nôtre, parlant à une amie. Elle ébouriffa ses cheveux courts, couleur sable, en passant ses doigts dedans. Les ventilateurs envoyèrent son parfum dans notre direction. J'avais l'habitude des effets que cette odeur avait sur moi – la douleur sèche dans ma gorge, le creux languissant dans mon estomac, la contraction automatique de mes muscles, l'afflux de venin dans ma bouche...
t-w-i-l-i-g-h-tTout cela était normal, habituellement facile à ignorer. C'était plus dur à présent, avec des sensations plus fortes, doublées, puisque je ressentais la réaction de Jasper. Deux soifs, au lieu de la mienne seule.
t-w-i-l-i-g-h-tJasper laissait son imagination l'emporter. Il se le représentait – se représentait se levant de sa chaise près d'Alice pour se placer près de la fille. Il pensait à se pencher vers elle, comme s'il allait lui murmurer à l'oreille, à laisser ses lèvres toucher la courbe de sa gorge. Imaginant quel goût aurait le flot chaud du pouls qui battait sous la peau fine une fois dans sa bouche...
t-w-i-l-i-g-h-tJe donnai un coup dans sa chaise.
Il me regarda dans les yeux un instant avant de baisser le regard. Je pouvais entendre la honte le disputer à la rébellion dans sa tête.
- Désolé, marmonna-t-il.
Je haussai les épaules.
- Tu n'allais rien faire, lui murmura Alice, apaisant son chagrin. Je pouvais le voir
t-w-i-l-i-g-h-tJe retins la grimace qui aurait trahi son mensonge. Nous devions nous serrer les coudes, Alice et moi. Ce n'était pas facile d'entendre des voix ou d'avoir des visions du futur. Tous deux des monstres parmi ceux qui étaient déjà des monstres. Chacun protégeait les secrets de l'autre.
- Ça aide si tu penses à eux en tant que personnes, suggéra Alice, sa voix haute et musicale trop rapide pour les oreilles humaines, si l'un d'entre eux avait été assez près pour nous entendre. "Elle s'appelle Whitney. Elle a une petite sœur, un bébé, qu'elle adore. Sa mère avait invité Esmé à cette garden party, tu te souviens ?"
- Je sais qui elle est" répondit-il sèchement. Il se tourna pour regarder à travers une des petites fenêtres qui étaient placées juste sous l'avant-toit, tout le long de la salle. Le ton de sa voix mit un terme à la conversation.
t-w-i-l-i-g-h-tIl devrait chasser cette nuit. Il était ridicule de prendre des risques comme cela, à tester sa force, construire son endurance. Il devrait accepter ses limites et apprendre à faire avec. Ses anciennes habitudes n'étaient pas favorables au mode de vie que nous avions choisi ; il ne devait pas poursuivre dans ce chemin-là.
t-w-i-l-i-g-h-tAlice soupira silencieusement et se leva, emportant son plateau – son accessoire, en fait –avec elle et le laissant seul. Elle savait qu'elle l'avait assez encouragé. Bien que la relation de Rosalie et Emmett soit plus flagrante, c'étaient Alice et Jasper qui connaissaient l'humeur de l'autre aussi bien que la sienne propre. Comme s'ils pouvaient également lire dans les pensées – bien que ce ne soit que dans celles de l'autre.
t-w-i-l-i-g-h-tEdward Cullen.
t-w-i-l-i-g-h-tJe réagis par réflexe. Je me tournai vers l'endroit d'où on m'avait appelé, bien que mon nom n'aie pas été prononcé, seulement pensé.
t-w-i-l-i-g-h-tMon regard croisa pendant une fraction de seconde une paire de grands yeux humains marron chocolat, appartenant à un visage pâle en forme de cœur. Je connaissais ce visage, bien que je ne l'aie encore jamais vu. Il avait été présent dans presque toutes les têtes humaines aujourd'hui. La nouvelle élève, Isabella Swan. Fille du chef de police de la ville, amenée à vivre ici par quelque nouvelle situation de garde. Bella. Elle avait corrigé tous ceux qui avaient utilisé son nom en entier...
t-w-i-l-i-g-h-tJe détournai le regard, ennuyé. Il me fallut une seconde pour réaliser que ce n'était pas elle qui avait pensé mon nom.
t-w-i-l-i-g-h-tEvidemment, elle craque déjà sur les Cullen, entendis-je la première pensée continuer.
Maintenant je reconnaissais la "voix". Jessica Stanley – cela faisait un moment qu'elle ne m'avait pas importuné avec son bavardage interne. Quel soulagement c'avait été quand elle avait laissé tomber l'intérêt mal placé qu'elle m'avait un temps porté. Il avait été presque impossible d'échapper à ses constantes et ridicules rêveries. J'avais souhaité, à l'époque, pouvoir lui expliquer exactement ce qui lui serait arrivé si mes lèvres, et les dents qui étaient derrière, s'étaient approchées d'elle. Cela aurait fait taire ces ennuyeux fantasmes. La pensée de sa réaction me fit presque sourire.
Grand bien lui fasse, continua Jessica. Elle n'est même pas jolie. Je me demande pourquoi Eric la regarde autant... ou Mike.
t-w-i-l-i-g-h-tElle tressaillit mentalement sur le dernier prénom. Son nouveau béguin, le très populaire Mike Newton, ne lui prêtait aucune attention. Apparemment, il n'était pas aussi insensible à la nouvelle. A nouveau comme l'enfant et son objet brillant. Cela envenima les pensées de Jessica, bien qu'elle se montrât très cordiale envers la nouvelle venue, pendant qu'elle lui racontait les histoires communes sur ma famille. La nouvelle élève avait dû lui poser des questions sur nous.
Tout le monde me regarde aussi, aujourd'hui, pensa-t-elle avec suffisance. Si ce n'est pas de la chance que j'aie deux cours avec elle... Je parie que Mike va vouloir me demander ce qu'elle-
t-w-i-l-i-g-h-tJ'essayai de bloquer ses jacassements ineptes avant que sa mesquinerie et son insignifiance ne me rendent fou.
- Jessica Stanley est en train d'étaler tout le linge sale de la famille Cullen à la nouvelle fille Swan murmurai-je à Emmett pour le distraire.
Il gloussa. J'espère qu'elle le fait bien, pensa-t-il.
- Assez peu original, en fait. Juste le minimum de sandale. Pas une once d'horreur. Je suis un peu déçu.
Et la nouvelle ? Elle est déçue par les ragots aussi ?
t-w-i-l-i-g-h-tJ'essayai d'entendre ce que cette nouvelle, Bella, pensait des commérages de Jessica. Que voyait-elle quand elle regardait l'étrange famille à la pâleur de craie qui était universellement évitée ?
t-w-i-l-i-g-h-tIl était en quelque sorte de ma responsabilité de connaître sa réaction. Je me comportais comme un guetteur – à défaut d'un meilleur mot – pour ma famille. Pour nous protéger. Si jamais quelqu'un devenait suspicieux, j'étais prévenu et nous permettais un repli facile. Cela arrivait de temps en temps – un humain à l'imagination active nous voyait comme les personnages d'un livre ou d'un film. t-w-i-l-i-g-h-tGénéralement ils se trompaient, mais il était plus sûr de s'installer ailleurs plutôt que de risquer un examen approfondi. Très, très rarement, quelqu'un devinait. Nous ne lui laissions alors pas la chance de vérifier son hypothèse. Nous disparaissions simplement, pour ne plus devenir qu'un souvenir terrifiant...
t-w-i-l-i-g-h-tJe n'entendis rien, bien que j'écoutasse ce qu'il y avait autour du frivole monologue interne de Jessica qui continuait de s'écouler. C'était comme s'il n'y avait personne assis à côté d'elle. Comme c'était étrange, la fille avait-elle bougé ? Cela n'était pas plausible, puisque Jessica jacassait toujours. Je me tournai pour vérifier, feignant de me balancer sur ma chaise. Vérifier ce que me disait mon "écoute supplémentaire" était quelque chose que je n'avais encore jamais fait.
t-w-i-l-i-g-h-tEncore une fois, mon regard rencontra les mêmes grands yeux marron. Elle était assise exactement à la même place, en train de nous regarder, chose que je trouvais naturelle puisque Jessica continuait à la régaler des rumeurs locales sur les Cullen.
t-w-i-l-i-g-h-tPenser à nous aurait également été une chose naturelle à faire.
Mais je n'entendais pas le moindre murmure.
t-w-i-l-i-g-h-tSes joues se teintèrent d'un rouge invitant, chaud, alors qu'elle baissait les yeux, loin de la gaffe embarrassante de s'être fait prendre à fixer un inconnu. Heureusement que Jasper était toujours en train de regarder par la fenêtre. Je n'aimais pas imaginer l'effet que cette accumulation de sang aurait eu sur son contrôle.
t-w-i-l-i-g-h-tLes émotions sur son visage avaient été aussi claires que si elles avaient été écrites sur son front : de la surprise, tandis qu'elle observait inconsciemment les subtiles différences entre son espèce et la mienne, de la curiosité, à l'écoute des histoires que lui racontait Jessica, et quelque chose de plus... de la fascination ? Cela n'aurait pas été la première fois. Pour elles, nos proies désignées, nous étions magnifiques. Et enfin, de l'embarras quand je l'avais surprise à me regarder. Et pourtant, bien que ses pensées aient été aussi claires dans ses yeux étranges – étranges de par leur profondeur ; les yeux marrons semblant généralement inexpressifs tant ils étaient foncés – seul le silence me provenait de l'endroit où elle était assise. Rien du tout.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'eus un court instant de malaise.
t-w-i-l-i-g-h-tJe n'avais jamais rencontré cela auparavant. Avais-je un problème ? Je me sentais pourtant exactement comme d'habitude. Tracassé, j'écoutai plus fort.
t-w-i-l-i-g-h-tToutes les voix que j'avais bloquées se mirent à crier dans ma tête.
... me demande quelle musique elle aime... Je pourrais peut-être lui parler de ce nouveau CD...pensait Mike Newton, deux tables plus loin – les yeux rivés sur Bella Swan.
Regardez-le la guigner. Ça ne lui suffit pas que la moitié des filles du lycée soient à ses pieds et n'attendent que... Les pensées d'Eric Yorkie étaient sulfureuses, et tournaient également autour de la fille.
... tellement écœurant. C'est comme si elle était célèbre ou...Même Edward Cullen la regarde... Lauren Mallory était si jalouse que son visage devait être à présent d'un jade foncé. Et Jessica, affichant sa nouvelle meilleure amie. Laissez-moi rire... Le vitriol continuait à suinter des pensées de la fille.
... parie que tout le monde lui a déjà demandé ça. Mais j'aimerais lui parler. Il faut que je trouve une question plus originale... songeait Ashley Dowling.
... peut-être qu'elle sera dans mon cours d'espagnol... espérait June Richardson.
... des tonnes à faire ce soir. Trigonométrie, et le devoir d'anglais. J'espère que Maman... Angela Weber, une fille discrète, dont les pensées étaient inhabituellement gentilles, était la seule à la table qui n'était pas obsédée par cette Bella.
t-w-i-l-i-g-h-tJe les entendais tous, entendais chaque chose insignifiante qu'ils pensaient au moment où elle leur traversait l'esprit. Mais rien du tout de la part de la nouvelle élève aux yeux si trompeusement communicatifs.
t-w-i-l-i-g-h-tEvidemment, je pouvais entendre ce qu'elle disait quand elle parlait à Jessica. Pas besoin de lire dans ses pensées pour entendre sa voix basse et claire à l'autre bout de la cafétéria.
- Qui c'est, ce garçon aux cheveux blond roux ? l'entendis-je demander, me jetant un regard du coin de l'œil avant de se tourner rapidement quand elle vit que je l'observais toujours.
t-w-i-l-i-g-h-tSi j'avais eu le temps d'espérer que le ton de sa voix pourrait m'aider à identifier ses pensées, perdues quelque part où je ne pouvais les atteindre, je fus instantanément déçu. D'habitude, les pensées des gens leur venaient avec le même ton que leurs voix physiques. Mais cette voix discrète et timide ne m'était pas familière, pas comme les centaines de pensées qui rebondissaient partout dans la cafétéria, en tout cas. Entièrement nouvelle.
t-w-i-l-i-g-h-tOh, bonne chance, idiote ! pensa Jessica avant de répondre à la question de la fille.
- C'est Edward. Il est superbe, mais inutile de perdre ton temps. Apparemment aucune des filles d'ici n'est assez bien pour lui." Elle renifla.
t-w-i-l-i-g-h-tJe détournai la tête pour cacher mon sourire. Jessica et ses camarades de classe n'avaient aucune idée de la chance qu'elles avaient, elle et ses camarades de classe, qu'aucune d'entre elles ne m'attire particulièrement. Sous l'humour passager, je ressentis une impulsion étrange, que je ne compris pas clairement. Cela avait un rapport avec les pensées venimeuses de Jessica, dont la nouvelle n'avait pas conscience... Je sentis l'urgence inexplicable de m'interposer entre elles, de protéger cette Bella Swan des rouages sombres qui tournaient dans l'esprit de son interlocutrice. Quel sentiment étrange. Essayant de déchiffrer les motivations qui se cachaient derrière mon impulsion, j'examinai la nouvelle une fois de plus.
t-w-i-l-i-g-h-tPeut-être était-ce seulement une sorte d'instinct protecteur qui ressurgissait – le fort pour le faible. Cette fille semblait plus fragile que ses nouveaux camarades. Sa peau était si translucide qu'il était difficile de croire qu'elle puisse lui offrir une quelconque protection contre le monde extérieur. Je pouvais voir la pulsation rythmique du sang dans ses veines à travers sa fine et pâle membrane...Mais je ne devais pas me concentrer là-dessus. J'étais assez bon dans cette vie que j'avais choisie, mais j'avais aussi soif que Jasper et il ne servait à rien de se laisser tenter.
t-w-i-l-i-g-h-tIl y avait une légère ride entre ses sourcils dont elle ne semblait pas avoir conscience.
C'était incroyablement frustrant ! Je pouvais clairement voir que c'était une torture pour elle d'être assise là, à faire la conversation avec des inconnus, le centre de toutes les attentions. Je pouvais sentir sa timidité à la façon dont elle tenait ses frêles épaules, très légèrement voûtées, comme si elle s'attendait à une rebuffade d'un moment à l'autre. Mais je ne pouvais que sentir, que voir, qu'imaginer. Rien d'autre que le silence en provenance de cette fille banale. Je ne pouvais rien entendre. Pourquoi ?
t-w-i-l-i-g-h-t- On y va ? murmura Rosalie, interrompant mes interrogations.
Je me détournai de la fille avec un sentiment de soulagement. Je ne voulais pas continuer à faillir ainsi – cela m'irritait. Et je ne voulais pas développer de l'intérêt pour ses pensées cachées simplement parce qu'elles m'étaient illisibles. Sans aucun doute, quand je les déchiffrerais – car je finirais bien par trouver un moyen de le faire – elles se révèleraient aussi futiles et insignifiantes que n'importe quelles pensées humaines. Cela ne valait pas l'effort que je fournirais pour les atteindre.
t-w-i-l-i-g-h-t - Alors, la nouvelle a peur de nous maintenant ? demanda Emmett, attendant toujours une réponse à la question qu'il avait posée.
t-w-i-l-i-g-h-tJe haussai les épaules. Emmett n'était pas intéressé au point de demander des informations supplémentaires. Je n'étais pas censé être intéressé non plus, d'ailleurs.
Nous nous levâmes et quittâmes la cafétéria.
t-w-i-l-i-g-h-tEmmett, Rosalie et Jasper faisaient semblant d'être en terminale ; ils se dirigèrent vers leurs classes. Je jouais un rôle plus jeune que le leur. Je partis vers mon cours de biologie avancée, me préparant mentalement à subir un ennui profond pendant le reste de la journée. Je doutais que M Banner, un homme d'intelligence moyenne, puisse trouver quoi que ce soit dans ses livres qui puisse surprendre quelqu'un ayant passé deux fois le diplôme de médecine.
t-w-i-l-i-g-h-tUne fois dans le labo de biologie, je m'installai sur ma chaise et éparpillai mes manuels – encore des accessoires ; ils ne contenaient rien que je ne sache déjà – sur ma table. J'étais le seul élève qui disposait d'une paillasse pour lui seul. Les humains n'étaient pas assez intelligents pour savoir qu'ils me craignaient, mais leur instinct de survie leur suffisait pour se tenir loin de moi.
t-w-i-l-i-g-h-tLa pièce se remplit lentement, au fur et à mesure que les autres finissaient de manger. Je me balançai sur ma chaise en attendant que le temps passe. Je souhaitai encore une fois être capable de dormir.
Comme je pensais à elle, quand Angela Weber rentra avec la nouvelle, son nom attira mon attention.
Bella a l'air aussi timide que moi... j'aimerais pouvoir lui dire quelque chose... mais je vais avoir l'air stupide...
Ouais !
pensa Mike Newton en se tournant pour voir la fille rentrer.
t-w-i-l-i-g-h-tEt toujours rien de la part de Bella Swan. L'espace vide où ses pensées auraient dû être m'irritait et me troublait.
t-w-i-l-i-g-h-tElle se rapprocha, traversant l'allée qui longeait ma table pour atteindre le bureau du professeur. La pauvre ; le seul siège libre était à côté de moi. Automatiquement, je définis ce qui serait sa place en empilant mes livres en une pile bien nette. Je doutais qu'elle se sente à l'aise près de moi. Elle était ici pour un long semestre dans cette classe, au moins. Peut-être que, étant plus près d'elle, je serais capable de lui soutirer ses secrets... Non pas que j'en aie déjà eu besoin de proximité avant... Ce n'était pas comme si j'allais trouver quoi que ce soit susceptible de m'intéresser.
t-w-i-l-i-g-h-tBella Swan se retrouva au milieu du courant d'air que produisaient les ventilateurs.
Son odeur me heurta comme une balle dévastatrice, comme un bélier furieux. Il n'y avait pas d'image assez puissante pour décrire la force de ce qui m'arrivait.
t-w-i-l-i-g-h-tA cet instant, je n'avais plus rien à voir avec l'humain que j'avais un jour été ; pas une trace des lambeaux d'humanité que je m'efforçais de conserver.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'étais le prédateur. Elle était ma proie. Il n'y avait plus rien au monde que cette vérité.
Il n'y avait plus de salle pleine de témoins – ils étaient déjà des dommages collatéraux dans mon esprit. Le mystère de ses pensées était oublié. Elles ne signifiaient plus rien, puisque dans quelques secondes elle ne penserait plus.
J'étais un vampire, et elle avait le sang le plus parfumé que j'aie senti en quatre-vingts ans.
Je n'aurais jamais pu imaginer qu'une telle odeur puisse exister. Si je l'avais su, je serais parti à sa recherche il y a longtemps. J'aurais passé la planète entière au peigne fin pour elle. J'en imaginais déjà le goût...
t-w-i-l-i-g-h-tLa soif me brûlait la gorge comme un feu ardent. Ma bouche était brûlante et desséchée. Le flot de venin frais ne fit pas disparaître cette sensation. Mon estomac se tordit sous l'effet de la faim, conséquence de ma soif. Mes muscles se bandèrent, prêts à l'action.
t-w-i-l-i-g-h-tUne seconde à peine avait passé. Elle effectuait toujours l'enjambée qui avait envoyé son odeur dans mes narines.
t-w-i-l-i-g-h-tAu moment où son pied toucha le sol, elle se tourna vers moi, dans un mouvement qu'elle espérait furtif. Son regard croisa le mien, et je vis mon reflet dans le grand miroir de ses yeux.
t-w-i-l-i-g-h-tLe choc du visage que j'y vis sauva sa vie pour quelques secondes épineuses.
t-w-i-l-i-g-h-tElle ne me rendait pas les choses faciles. En constatant l'expression de mon visage, le sang afflua une fois de plus à ses joues, leur donnant la plus belle couleur que j'aie jamais vue. Son odeur était un nuage épais dans ma tête. Je pouvais à peine penser à autre chose. Mes pensées rageaient, résistant à mon contrôle, incohérentes.
t-w-i-l-i-g-h-tElle marchait plus vite à présent, comme si elle avait compris qu'elle devait s'échapper. Sa hâte la rendit maladroite – elle trébucha sur un livre et tituba, manquant de justesse de tomber sur la fille assise à la table devant moi. Vulnérable, faible. Plus que normal pour un humain.
J'essayai de me concentrer sur le visage que j'avais vu dans ses yeux, un visage que j'avais reconnu avec révulsion. Le visage du monstre en moi – le visage que j'avais réduit à l'impuissance grâce à des décennies de discipline et de contrôle intransigeants. Avec quelle facilité il était soudain remonté à la surface !
t-w-i-l-i-g-h-tL'odeur tourbillonna autour de moi à nouveau, dispersant mes pensées et manquant de me propulser hors de mon siège.
t-w-i-l-i-g-h-tNon.
t-w-i-l-i-g-h-tMa main s'agrippa au bord de la table tandis que je tentais de rester sur ma chaise. Le bois ne se montrait pas très coopératif. Ma main écrasa le support et je me retrouvai avec une écharde entre les doigts, laissant l'empreinte de ma main dans le bois qui restait.
t-w-i-l-i-g-h-tDétruire l'évidence. C'était une règle fondamentale. Je pulvérisai rapidement les bords de l'empreinte du bout de mes doigts, ne laissant plus qu'un trou irrégulier en une pile de copeaux sur le sol, que j'éparpillai du pied.
Détruire l'évidence. Dommages collatéraux...
t-w-i-l-i-g-h-tJe savais ce qui allait se passer à présent. La fille n'aurait d'autre choix que de s'asseoir à côté de moi, et je serais obligé de la tuer.
Les innocents badauds de la classe, dix-huit adolescents et un homme, ne seraient pas autorisés à sortir de la salle, ayant vu ce qu'ils allaient bientôt voir.
t-w-i-l-i-g-h-tJe tressaillis à l'idée de ce que j'allais devoir faire. Même dans mes pires moments, jamais je n'avais commis une telle atrocité. Je n'avais jamais tué d'innocents, pas un en huit décennies. Et voilà qu'à présent je planifiais d'en supprimer une vingtaine d'un coup.
t-w-i-l-i-g-h-tLe visage du monstre dans le miroir me regarda d'un air narquois.
Même si une partie de moi frissonnait en pensant au monstre, une autre se réjouissait de ce que je préparais.
Si je tuais la fille en premier, je n'aurais que quinze ou vingt secondes avec elle avant que les humains dans la pièce ne réagissent. Peut-être un peu plus, s'ils ne se rendaient pas tout de suite compte de ce que je faisais. Elle n'aurait pas le temps de crier ou d'avoir mal ; je ne la tuerais pas cruellement. C'était tout ce que je pouvais offrir à cette étrangère au sang si horriblement désirable.
Mais dans ce cas, je devrais empêcher les autres de s'échapper. Je n'aurais pas à m'inquiéter des fenêtres, trop petites et hautes pour permettre à quiconque de s'échapper. Seulement la porte – si je la bloquais, ils étaient piégés.
t-w-i-l-i-g-h-tCela serait plus lent et plus compliqué, essayer de les prendre tous alors qu'ils seraient paniqués en train de se bousculer, au milieu du chaos. Assez de temps pour qu'il y ait beaucoup de cris. Quelqu'un entendrait... et je serais forcé de tuer encore plus d'innocents pendant cette heure sombre.
Et son sang refroidirait pendant que je serais occupé à tuer les autres.
t-w-i-l-i-g-h-tL'odeur me punit, fermant ma gorge d'une douleur sèche...
Les témoins d'abord alors.
t-w-i-l-i-g-h-tJe me représentai mentalement la pièce. J'étais au milieu, dans la rangée la plus éloignée de la porte. Je m'occuperais du côté droit en premier. J'estimais pouvoir briser quatre ou cinq nuques par seconde. Cela ne ferait pas de bruit. Le côté droit aurait de la chance ; il ne me verrait pas venir. Le temps de faire toute la rangée de gauche, il me faudrait, au plus, cinq secondes pour mettre un terme à toutes les vies présentes dans le labo.
Assez longtemps pour que Bella Swan voie brièvement ce qui allait lui arriver. Assez longtemps pour qu'elle ait peur. Assez longtemps, peut-être, si le choc ne la pétrifiait pas sur place, pour qu'elle pousse un cri. Un cri ténu qui ne ferait accourir personne.
t-w-i-l-i-g-h-tJe pris une profonde inspiration, et l'odeur fut un feu qui parcourut mes veines sèches, incendiant ma poitrine pour consumer toute parcelle de la bonté dont j'étais capable.
Elle se retournait. Dans quelques secondes, elle ne se tiendrait qu'à quelques centimètres de moi.
Le monstre dans ma tête sourit à l'avance.
t-w-i-l-i-g-h-tQuelqu'un ferma bruyamment son classeur quelque part sur ma gauche. Je ne levai pas les yeux pour voir lequel de ces humains voués à disparaître était à la source du bruit. Mais le mouvement m'envoya une bouffée d'air ordinaire, dépourvu d'odeur.
t-w-i-l-i-g-h-tL'espace d'une seconde, je fus capable de réfléchir clairement. Pendant cette précieuse seconde, deux visages s'imposèrent à ma vue, côte à côte.
L'un était le mien, ou plutôt ce qu'il avait un jour été : le monstre aux yeux rouges qui avait tué tant de gens que j'avais cessé de les compter. Des meurtres rationnels, justifiés. Un tueur de tueurs, un tueur d'autres monstres moins puissants. C'était un complexe divin, je le reconnaissais – décider qui méritait la peine de mort. C'était un compromis auquel j'étais parvenu seul. Je me nourrissais de sang humain, mais seulement au sens le plus vague. Mes victimes étaient, de par leurs passe-temps répugnants, à peine plus humaines que moi.
L'autre était celui de Carlisle.
t-w-i-l-i-g-h-tIl n'y avait aucune ressemblance entre ces deux visages. Ils étaient le jour et la nuit.
Il n'y avait d'ailleurs aucune raison pour qu'ils se ressemblent. Carlisle n'était pas mon père au sens biologique du terme. Nous n'avions pas de points communs. La similarité de notre teint était le résultat de ce que nous étions ; tous les vampires avaient la même peau de glace. La ressemblance de la couleur de nos yeux avait une autre cause – le reflet d'un choix mutuel.
t-w-i-l-i-g-h-tEt en ce moment, alors qu'il n'y avait au départ aucun point commun entre nous, j'imaginai que mon visage avait commencé à ressembler au sien pendant les soixante-dix ans que j'avais passé à respecter son choix et suivre ses traces. Mes traits n'avaient pas changé, mais il me semblait à présent qu'un peu de sa sagesse marquait mon expression, qu'on pouvait retrouver une partie de sa compassion dans la forme de ma bouche, que des traces de sa patience se lisaient clairement sur mon front.
Toutes ces subtiles améliorations étaient absentes du visage du monstre. Dans un moment, plus rien en moi ne reflèterait les années que j'avais passées avec mon créateur, mon mentor, mon père de toutes les façons possibles. Mes yeux rougeoieraient comme ceux d'un démon ; toute ressemblance serait perdue à jamais.
t-w-i-l-i-g-h-tDans ma tête, les yeux pleins de bonté de Carlisle ne me jugeaient pas. Je savais qu'il me pardonnerait l'acte horrible que je m'apprêtais à faire. Parce qu'il m'aimait. Parce qu'il me croyait meilleur que je ne l'étais réellement. Et il continuerait à m'aimer, même si je lui prouvais bientôt qu'il avait tort.
Bella Swan s'assit, ses mouvements raidis et maladroits – de peur ? – et l'odeur de son sang forma un nuage inexorable autour de moi.
Je prouverais à mon père qu'il avait tort. La souffrance que cet acte lui causerait serait presque aussi douloureuse que la sécheresse dans ma gorge. Je m'éloignai d'elle par répulsion – révolté par le monstre qui brûlait de se saisir d'elle.
Pourquoi était-elle venue ici ? Pourquoi fallait-il qu'elle existe ? Pourquoi était-elle venue gâcher la paix que j'avais réussi à instaurer dans ma non-vie ? Pourquoi cette exaspérante humaine était-elle née ? Elle me ruinerait.
t-w-i-l-i-g-h-tJe tournai mon visage vers l'extérieur de la table, sous l'effet d'une violence subite, une haine irraisonnée parcourant mon être tout entier.
t-w-i-l-i-g-h-tQui était cette créature ? Pourquoi moi, pourquoi maintenant ? Pourquoi devais-je tout perdre simplement parce qu'elle avait choisi d'apparaître dans cette invraisemblable petite ville ?
Pourquoi était-elle venue !
Je ne voulais pas être un monstre ! Je ne voulais pas tuer cette pièce remplie d'adolescents sans défense ! Je ne voulais pas perdre tout ce que j'avais péniblement gagné au cours d'une vie de sacrifice et d'abnégation !
Je ne le ferais pas. Elle ne pourrait pas m'y obliger.
t-w-i-l-i-g-h-tSon odeur était un problème, l'hideusement attirante odeur de son sang. S'il existait ne serait-ce qu'une façon de résister... si seulement une autre bouffée d'air frais pouvait éclaircir ma tête une fois de plus.
t-w-i-l-i-g-h-tBella Swan agita sa longue et épaisse chevelure acajou dans ma direction.
Etait-elle folle ? C'était comme si elle encourageait le monstre ! Comme si elle le tentait.
Il n'y avait aucune brise amicale capable d'éloigner son odeur de moi à présent. Tout serait bientôt perdu.
Non, il n'y avait aucune brise capable de m'aider. Mais je n'avais pas besoin de respirer.
Je stoppai le flot d'air qui circulait dans mes poumons ; le soulagement fut instantané, mais incomplet. J'avais toujours le souvenir de son odeur dans la tête, son goût à l'arrière de ma langue. Même à ça je ne pourrais pas résister longtemps. Mais je pouvais peut-être résister une heure. Une heure. Juste assez pour sortir de cette pièce pleine de victimes, victimes qui finalement n'auraient peut-être pas à en être. Si je pouvais résister une petite heure.
t-w-i-l-i-g-h-tNe pas respirer était un sentiment assez inconfortable. Mon corps n'avait pas besoin d'oxygène, mais cela allait à l'encontre de mes instincts. Je dépendais de mon odorat plus que de mes autres sens quand j'étais stressé. Il me montrait le chemin quand je chassais, il était le premier avertissement en cas de danger. Je n'étais pas souvent tombé sur une créature aussi dangereuse que moi, cependant mon instinct de conservation était aussi fort que celui de n'importe quel humain moyen. Inconfortable, mais raisonnable. Plus supportable que la sentir et ne pas planter mes dents dans cette peau douce, claire et translucide, ne pas pouvoir atteindre son sang chaud, bouillonnant et –
Une heure ! Rien qu'une heure. Je ne devais pas penser à l'odeur, au goût.
t-w-i-l-i-g-h-tLa fille, silencieuse, gardait ses cheveux entre nous, se penchant tant qu'ils touchaient son classeur. Je ne pouvais pas voir son visage, ne pouvais pas lire ses émotions dans ses profonds yeux clairs. Etait-ce pour cela qu'elle avait déployé ses longues boucles entre nous ? Pour me cacher ses yeux ? Par peur ? Timidité ? Pour garder ses secrets loin de moi ?
Mon ancienne irritation, de ne pas pouvoir lire ses pensées, n'était plus rien en comparaison du besoin – et de la haine – qui me possédaient désormais. Car je haïssais cette frêle femme-enfant à côté de moi, la haïssais de toute la ferveur avec laquelle je m'accrochais à mon ancien moi, à ma famille, à mes rêves d'être quelqu'un de meilleur que ce que j'étais...
Je la haïssais, je haïssais ce qu'elle me faisait ressentir – cela m'aidait un peu. Oui, l'irritation que j'avais ressentie avant était faible, mais elle aidait cependant. Je m'accrochais à chaque émotion qui me distrairait de la pensée du goût qu'elle aurait...
Haine et irritation. Impatience. L'heure ne passerait-elle donc jamais ?
Et quand elle serait terminée...Elle sortirait de la pièce. Que ferais-je alors ?
Je pourrais me présenter. Bonjour, je m'appelle Edward Cullen. Je peux t'accompagner vers ton prochain cours ?
Elle dirait oui. Ce serait la chose la plus polie à faire. Même si elle me craignait déjà, comme je le suspectais, elle suivrait les conventions et marcherait avec moi. Il serait assez simple de l'entraîner dans la mauvaise direction. Une partie de la forêt s'avançait près des bâtiments, atteignant le coin le plus éloigné du parking. Je pouvais lui dire que j'avais oublié un livre dans ma voiture...
Quelqu'un remarquerait-il que j'étais la dernière personne avec laquelle on l'avait aperçue ? Il pleuvait, comme d'habitude ; deux imperméables sombres ne piqueraient pas trop la curiosité des autres, et ne risquaient pas de me trahir.
t-w-i-l-i-g-h-tSauf que je n'étais pas le seul élève qui s'intéressait à elle aujourd'hui – bien que personne ne soit aussi intensément captivé. Mike Newton, en particulier, était conscient de chaque changement dans ses appuis quand elle remuait sa chaise – elle était mal à l'aise trop près de moi, comme tout le monde, comme ce à quoi je m'étais attendu avant que son odeur ne détruise toutes mes préoccupations charitables. Mike Newton remarquerait si elle quittait la classe avec moi.
Si je pouvais attendre une heure, pouvais-je en attendre deux ?
Je tressaillis à la douleur que me causait la brûlure.
Elle rentrerait chez elle, et sa maison serait vide. Le chef Swan travaillait tard le soir. Je savais où elle se trouvait, tout comme je savais où habitait chacun dans cette ville minuscule. Sa maison était nichée tout contre un petit bois, sans voisins proches. Même si elle avait le temps de crier, ce qui n'arriverait pas, personne ne l'entendrait.
t-w-i-l-i-g-h-tCela serait une façon raisonnable d'agir. Je m'en étais sorti sept décennies sans sang humain, je pouvais bien résister une heure. Et quand je serais seul avec elle, il n'y aurait plus aucun risque que je blesse quelqu'un d'autre. Et pas besoin de se hâter alors que tu as tant d'expérience, acquiesça le monstre dans ma tête.
t-w-i-l-i-g-h-tIl était stupide de penser qu'en sauvant les dix-neuf humains dans cette pièce grâce à mes efforts patients, je serais moins monstrueux au moment de tuer cette fille innocente.
Bien que je la haïsse, je savais que ma haine était injuste. Je savais que ce que je détestais était en réalité moi-même. Et je nous haïrais tous deux tellement plus quand elle serait morte...
t-w-i-l-i-g-h-tJe passai l'heure ainsi – à imaginer les meilleures façons de la tuer. J'essayais d'éviter d'imaginer l'acte lui-même. Cela aurait été trop pour moi ; je risquais de perdre cette bataille et de finir par tuer tous ceux qui se trouvaient dans la salle. Je ne planifiais que ma stratégie, rien de plus. Cela m'aida à supporter l'heure.
t-w-i-l-i-g-h-tA un moment, vers la fin du cours, elle me jeta un coup d'œil à travers la tenture fluide de ses cheveux. Je pouvais sentir la haine injustifiée qui me brûlait quand je croisai son regard – je voyais mon reflet dans ses yeux effrayés. Le sang monta à ses joues avant qu'elle puisse s'abriter à nouveau derrière son rideau, et je faillis succomber.
Mais la cloche sonna. Sauvé par le gong – quel cliché. Nous étions tous les deux sauvés. Elle, sauvée de la mort. Moi, sauvé pour un court moment de l'obligation de redevenir la créature cauchemardesque que je redoutais et méprisais
t-w-i-l-i-g-h-tJe ne parvins pas à garder une allure humaine tant j'avais hâte de sortir de la salle. Si quelqu'un m'avait regardé, il aurait sûrement remarqué qu'il y avait quelque chose d'anormal quant à la façon dont je me déplaçais. Mais personne ne faisait attention à moi. Toutes les pensées humaines continuaient à graviter autour de la fille qui était condamnée à mourir dans un peu plus d'une heure.
Je me cachai dans ma voiture.
Je n'aimais pas penser que je devais me cacher. Ça sonnait tellement lâche. Mais c'était incontestablement le cas.
t-w-i-l-i-g-h-tJe n'avais pas assez d'emprise sur moi-même pour pouvoir m'approcher d''humains sans danger. Fournir autant d'efforts afin d'épargner l'un d'entre eux ne me laissait pas assez de ressources pour résister aux autres. Quel gâchis ce serait. Si je devais céder au monstre, autant que ma défaite en vaille la peine.
t-w-i-l-i-g-h-tJe mis en route un CD qui d'ordinaire me calmait, mais en ce moment il était inefficace. Non, ce qui m'aidait le plus à présent, c'était l'air frais et nettoyé par la pluie fine que j'inspirai profondément par ma fenêtre ouverte. Bien que je me rappelle parfaitement l'odeur enivrante de Bella Swan, cet air propre me faisait l'effet d'une douche qui débarrassait mon corps de cette infection.
J'étais à nouveau sain d'esprit. Je pouvais à nouveau penser. Et je pouvais à nouveau me battre. Me battre contre ce que je ne voulais pas être.
Je n'étais pas obligé d'aller chez elle. Je n'étais pas obligé de la tuer. Evidemment, j'étais une créature rationnelle et pensante, et j'avais le choix. On avait toujours le choix.
Je ne m'étais pas senti comme ça dans la classe... mais j'étais loin d'elle à présent. Peut-être que si je l'évitais très, très prudemment, je n'aurais rien à changer à ma vie. Tout allait comme je le désirais. Pourquoi devais-je laisser cette exaspérante et délicieuse anonyme tout ruiner ?
Je n'étais pas obligé de décevoir mon père. Je n'étais pas obligé de causer à ma mère de l'inquiétude, de l'embarras... de la tristesse. Oui, cela blesserait également ma mère adoptive. Et Esmé était si gentille, si douce et aimante. Faire de la peine à quelqu'un comme elle était absolument inexcusable.
t-w-i-l-i-g-h-tQuelle ironie que j'aie voulu protéger cette fille de la menace dérisoire et inoffensive que représentaient les pensées sarcastiques de Jessica ! J'étais la dernière personne qui se comporterait comme un protecteur envers Bella Swan. Elle n'aurait jamais besoin d'autant de protection que celle dont elle avait besoin contre moi.
t-w-i-l-i-g-h-tOù était Alice ? me demandai-je soudain. Ne m'avait-elle pas vu tuant la fille Swan de multiples façons ? Pourquoi n'était-elle pas venue aider – pour m'arrêter ou m'aider à effacer les traces de l'évidence, qu'importe ? Etait-elle si absorbée par sa surveillance du futur de Jasper qu'elle n'avait pas perçu l'évènement bien plus grave qui risquait d'arriver ? Etais-je plus fort que je ne le croyais ? Ne ferais-je donc rien à la fille ?
t-w-i-l-i-g-h-tNon. Je savais que ce n'était pas vrai. Alice devait être concentrée sur Jasper de toutes ses forces. Je cherchai dans la direction dans laquelle je savais qu'elle était, dans le petit bâtiment qui abritait les salles d'anglais. Il ne me fallut pas longtemps pour localiser sa "voix" familière. Et j'avais raison. Toutes ses pensées étaient tournées vers Jasper, scrutant avec attention chaque minute de son futur.
Je souhaitais qu'elle me donne un conseil, mais en même temps, j'étais heureux qu'elle ne sache pas ce dont j'étais capable. Qu'elle n'ait pas connaissance du massacre que j'avais projeté une heure auparavant.
Je sentis une nouvelle brûlure en moi – celle de la honte. Je ne voulais pas qu'ils sachent.
Si je pouvais éviter Bella Swan, si je pouvais m'arranger pour ne pas la tuer – alors que je pensais cela, le monstre dans mon ventre se tordit et grinça des dents – personne n'aurait besoin de savoir. Si je pouvais rester loin de son odeur...
t-w-i-l-i-g-h-tIl n'y avait aucune raison pour que je n'essaye pas. Pour que je fasse le bon choix. Que je tente d'être ce que Carlisle pensait que j'étais.
t-w-i-l-i-g-h-tLa dernière heure touchait à sa fin. Je décidai de mettre mon plan en action. Cela valait mieux que rester sur le parking où elle risquait de passer et de ruiner toutes mes tentatives. Je ressentais encore cette haine injustifiée envers la fille. Je détestais qu'elle ait ce pouvoir inconscient sur moi. Qu'elle puisse m'obliger à être quelque chose que je ne supportais pas.
t-w-i-l-i-g-h-tJe me dirigeai vivement – un peu trop vivement, mais il n'y avait pas de témoins – vers l'accueil du lycée. Il n'y avait aucune raison pour que Bella Swan croise mon chemin. Je l'éviterais comme le fléau qu'elle était.
Il n'y avait personne à l'accueil à part la secrétaire, celle que je voulais voir.
Elle ne remarqua pas mon entrée silencieuse.
t-w-i-l-i-g-h-t- Mme Cope ?
t-w-i-l-i-g-h-tLa femme aux cheveux d'un rouge artificiel leva la tête et ses yeux s'agrandirent. Cela les mettait toujours sur leurs gardes, ces petits signes qu'ils ne comprenaient pas, quel que soit le nombre de fois qu'ils avaient vu l'un d'entre nous auparavant.
t-w-i-l-i-g-h-t- Oh, fit-elle, le souffle coupé et un peu troublée. Elle tira sur son tee-shirt. Stupide, pensa-t-elle. Il a quasiment l'âge d'être mon fils. Trop jeune pour penser à lui comme ça... "Bonjour, Edward. Que puis-je faire pour toi ? " Ses cils battaient derrière ses épaisses lunettes.
t-w-i-l-i-g-h-tMal à l'aise. Mais je savais me montrer charmant quand je le désirais. C'était simple, dès lors que je savais ce qu'ils pensaient de mes gestes ou de mes intonations.
t-w-i-l-i-g-h-tJe me baissai vers elle, la regardant comme si j'étais ensorcelé par ses yeux marron terne. Ses pensées se troublaient déjà. Ce serait facile.
- Je me demandais si vous pouviez m'aider à propos de mon emploi du temps, dis-je de ma voix la plus douce, celle que j'utilisais pour ne pas effrayer les humains.
J'entendis son rythme cardiaque s'affoler.
- Bien sûr, Edward, comment puis-je t'aider ? " Trop jeune, trop jeune, se répétait-elle. Elle avait tout faux, bien entendu. J'étais plus âgé que son grand-père. Mais si on s'en tenait à mon permis de conduire, elle avait raison.
- Je me demandais s'il était possible d'échanger mon cours de biologie avec une matière de niveau terminale. Peut-être la physique ?
- As-tu un problème avec M. Banner, Edward ?
- Non, pas du tout, c'est juste que j'ai déjà étudié ce qu'on fait en ce moment, alors...
- Dans cette école avancée dans laquelle tu étais en Alaska, c'est bien ça ? " Elle pinça ses fine lèvres en disant cela. Ils devraient tous être à l'université. J'ai entendu les professeurs se plaindre. Parfaits en tous points, jamais une réponse hésitante, jamais une faute aux contrôles – comme s'ils avaient trouvé un moyen de tricher dans toutes les matières. M. Varner préférerait croire qu'on triche plutôt que d'admettre qu'un élève est plus intelligent que lui... Je parie que leur mère leur paye des cours particuliers... "En fait, Edward, la classe de physique est pleine. M. Banner n'aime pas avoir plus de vingt-cinq élèves en même temps. "
- Je ne dérangerai personne.
t-w-i-l-i-g-h-tBien sûr que non. Pas un parfait Cullen.
- Je le sais, Edward, mais il n'y aura pas assez de sièges et...
- Je pourrais peut-être laisser tomber cette matière, alors. J'utiliserai ce temps libre pour étudier seul. "
- Laisser tomber la biologie ? " Elle resta bouche bée. C'est n'importe quoi. Quel problème pourrait-il avoir à étudier un sujet qu'il connaît déjà ? Il doit y avoir un problème avec M. Banner. Je devrais peut-être en parler à Bob... " Tu n'auras pas assez de points pour obtenir ton diplôme. "
- Je rattraperai l'année prochaine. "
- Tu devrais peut-être en parler à tes parents. "
t-w-i-l-i-g-h-tLa porte s'ouvrit derrière moi, mais qui que ce soit il ne pensa pas à moi, je ne m'en préoccupai donc pas et me concentrai sur Mme Cope. Je me rapprochai légèrement, et agrandis un peu mes yeux. Cela marchait d'ordinaire mieux quand ils étaient dorés. La noirceur faisait peur aux gens, à juste titre.
- Je vous en prie, Mme Cope." Je rendis ma voie aussi onctueuse et persuasive que possible – et elle pouvait être très persuasive. "N'y a-t-il aucune autre matière avec laquelle je pourrais échanger ? Il doit bien y avoir un autre horaire disponible ? Six heures de biologie n'est sûrement pas la seule option..."
t-w-i-l-i-g-h-tJe lui souris, faisant attention à ne pas trop découvrir mes dents pour ne pas l'effrayer, laissant mon expression adoucir mon visage.
t-w-i-l-i-g-h-tSon rythme cardiaque s'emballa. Trop jeune, se rappela-t-elle frénétiquement.
- Eh bien, peut-être pourrai-je parler à Bob – je veux dire M. Banner. Je verrai si –
t-w-i-l-i-g-h-tIl ne fallut qu'une seconde pour tout changer ; l'atmosphère dans la pièce, ma mission ici, la raison pour laquelle je m'étais penché vers la femme aux cheveux rouges... Ce que j'avais accompli dans un but précis se détourna vers un autre.
t-w-i-l-i-g-h-tIl ne fallut qu'une seconde à Samantha Wells pour ouvrir la porte et jeter son billet de retard dans la corbeille près de l'entrée, puis se précipiter dehors, dans sa hâte de quitter le lycée. Il ne fallut qu'une seconde pour que la soudaine bourrasque de vent s'engouffre dans mes narines. Il ne me fallut qu'une seconde pour réaliser pourquoi le premier arrivant ne m'avait pas dérangé avec ses pensées.
t-w-i-l-i-g-h-tJe me retournai, bien que je n'eusse pas besoin de vérifier. Je pivotai lentement, luttant pour garder le contrôle sur mes muscles qui se rebellaient.
Bella Swan se tenait à l'entrée du bureau, son sac adossé au mur, une feuille de papier serrée fort entre ses doigts. Ses yeux s'agrandirent encore plus quand elle croisa mon regard féroce et inhumain.
t-w-i-l-i-g-h-tL'odeur de son sang satura chaque particule d'air dans la pièce étroite et surchauffée. Ma gorge s'enflamma.
t-w-i-l-i-g-h-tLe monstre me jeta à nouveau un regard furieux depuis ses prunelles, masque démoniaque.
t-w-i-l-i-g-h-tMa main hésita dans l'air au-dessus du comptoir. Je n'aurais pas besoin de regarder où se trouvait Mme Cope avant de l'escalader et d'aplatir sa tête avec tant de force que cela la tuerait. Deux vies, au lieu de vingt. Un échange.
Le monstre affamé attendait anxieusement que je le fasse.
Mais on avait toujours le choix – on devait l'avoir.
t-w-i-l-i-g-h-tJe stoppai le mouvement de mes poumons, et fixai le visage de Carlisle devant mes yeux. Je me retournai vers Mme Cope, et entendis sa surprise interne devant le brusque changement de mon expression. Elle recula loin de moi, mais sa peur ne prit pas forme de mots cohérents.
t-w-i-l-i-g-h-tUtilisant tout le contrôle que j'avais acquis pendant des décennies d'abnégation, je rendis ma voix douce et égale.
- Tant pis. C'est impossible, et je comprends. Merci quand même.
t-w-i-l-i-g-h-tJe tournai les talons et m'élançai à l'extérieur, essayant de ne pas sentir la chaleur du sang de la fille alors que je ne passais qu'à quelques centimètres d'elle.
t-w-i-l-i-g-h-tJe ne m'arrêtai pas avant d'être arrivé dans ma voiture, bougeant trop vite pendant tout le trajet. La plupart des humains avaient déjà quitté les lieux, il n'y avait donc plus beaucoup de témoins. J'entendis un étudiant de deuxième année, D.J. Garrett, me remarquer, sans me prêter attention.
D'où est arrivé Cullen – c'est comme si il était sorti de nulle part... Voilà que je me laisse emporter par mon imagination encore une fois. Maman me dit toujours...
t-w-i-l-i-g-h-tQuand je me glissai dans ma Volvo, les autres y étaient déjà. J'essayai de contrôler ma respiration, mais je haletais comme si j'étais en train d'étouffer.
- Edward ? me demanda Alice, alarmée.
t-w-i-l-i-g-h-tJe secouai la tête.
- Bon sang, qu'est-ce qui t'est arrivé ? s'enquit Emmett, pour le moment distrait du fait que Jasper ne soit pas d'humeur à lui accorder sa revanche.
t-w-i-l-i-g-h-tAu lieu de répondre, je démarrai la voiture en marche arrière. Je devais partir de là avant que Bella Swan puisse m'y suivre aussi. Mon démon personnel, celui qui me hantait... Je fis demi-tour et accélérai. Je passai la quatrième avant d'arriver sur la route. Une fois dessus, je mis la cinquième avant d'en tourner le coin.
t-w-i-l-i-g-h-tSans regarder, je sus que Rosalie, Emmett et Jasper s'étaient tous tournés vers Alice. t-w-i-l-i-g-h-tElle haussa les épaules. Elle ne pouvait pas voir ce qui s'était passé, seulement ce qui allait arriver.
t-w-i-l-i-g-h-tA présent, elle cherchait dans mon futur. Nous vîmes en même temps ce qui défilait dans sa tête, et nous fûmes aussi surpris l'un que l'autre.
- Tu t'en vas ? murmura-t-elle.
t-w-i-l-i-g-h-tLes autres avaient les yeux fixés sur moi à présent.
- Vraiment ? sifflai-je entre mes dents.
t-w-i-l-i-g-h-tElle vit alors mon futur changer brutalement, le choix que je venais de prendre l'entraînant dans une direction bien plus sombre.
- Oh.
t-w-i-l-i-g-h-tBella Swan, morte. Mes yeux, rendus cramoisis par le sang frais. Les recherches que cela entraînerait. Le temps nécessaire qu'il nous faudrait attendre avant de pouvoir à nouveau nous montrer au grand jour et tout recommencer...
- Oh, répéta-t-elle. La vision devint plus nette. Je voyais l'intérieur de la maison du chef Swan pour la première fois, voyais Bella dans une petite cuisine aux placards jaunes, le dos qu'elle m'offrait alors que je la traquais depuis les ténèbres...son odeur m'attirant irrépressiblement...
- Stop ! grondai-je, incapable d'en supporter plus.
- Désolée, murmura-t-elle, les yeux grands ouverts
t-w-i-l-i-g-h-tLe monstre se réjouit.
t-w-i-l-i-g-h-tEt la vision dans sa tête changea à nouveau. Une autoroute vide de nuit, les arbres qui la bordaient couverts de neige, moi filant à la vitesse de l'éclair, dépassant allègrement les deux cent kilomètres à l'heure.
- Tu me manqueras, me déclara-t-elle. Même si tu ne pars pas longtemps.
t-w-i-l-i-g-h-tEmmett et Rosalie échangèrent un long regard d'appréhension.
t-w-i-l-i-g-h-tNous étions presque arrivés à la longue allée qui menait chez nous.
- Dépose-nous là, ordonna-t-elle. Mais tu devrais le dire à Carlisle toi-même.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'acquiesçai et arrêtai la voiture dans un crissement de pneus.
t-w-i-l-i-g-h-tEmmett, Rosalie et Jasper sortirent en silence ; ils demanderaient à Alice de s'expliquer une fois que je serais parti. Alice pressa mon épaule.
- Tu feras ce qu'il faut ", m'assura-t-elle. Pas une vision cette fois – un ordre. " Elle est la seule famille de Charlie Swan. Ça le tuerait aussi."
- Oui, répondis-je, d'accord seulement avec la dernière partie.
t-w-i-l-i-g-h-tElle se glissa dehors pour rejoindre les autres, les sourcils froncés par l'anxiété. Ils se fondirent dans les bois, hors de vue avant que j'aie effectué mon demi-tour.
t-w-i-l-i-g-h-tJ'accélérai en retournant vers la ville, sachant que les visions d'Alice passeraient des ténèbres à la lumière, à la manière d'un stroboscope. Tandis que j'entrais dans Forks, frôlant les 150 km/h, je n'étais pas vraiment sûr de la direction que j'allais prendre ensuite. Irais-je à l'hôpital dire au revoir à mon père ? Ou faire ce que me dictait le monstre en moi ? La route s'envola sous mes pneus.

 

 

 


 
 
le 12-02-2009 19:36

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le 12-02-2009 19:26

 

 

 

 

 


 
 
 

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